Metal Gear Rising : Revengeance

Metal Gear Rising : Revengeance

Quelqu’un frappe à la porte.

– Qui est-ce ? Oh, bonjour Kojima ! Alors, comment ça se passe le développement de Metal Gear Solid 5 ?
– On fait ce qu’on peut. Kenji Saito, je peux te parler deux minutes ?

Saito invite Kojima à s’asseoir à l’intérieur d’un Platinum Games en train de s’affairer sur Anarchy Reigns, et en train de régler les détails de la commande de Legend of Korra, ainsi que divers jeux Nintendo. Kamiya comme à son habitude, est en train de donner des leçons à tout le monde en fouettant les développeurs les plus lents, tout en finissant une nouvelle fois Megaman, mais en y jouant avec le pouce uniquement cette fois.

– Alors ? Qu’est-ce que tu deviens ?
– Konami, ces espèces de connards, me font la misère. Je traîne avec le projet Metal Gear Rising ; j’ai du mal avec le Fox Engine et Metal Gear Solid V.
– 5 plutôt non ?
– Non-non, V, enfin, on s’en tape. J’ai besoin de vous.
– Attends, toi, tu as besoin de nous ?
– Oui, carrément. Je suis dans la merde ; j’arrive même pas à trouver la direction du projet. Je ne sais pas quoi faire. Je t’en supplie, je veux me débarrasser de ce jeu à la con.
– Ah, tu veux qu’on récupère le bébé, et qu’on fasse en sorte que ce soit pour une fois un jeu vidéo et pas une cinématique entrecoupée de phases de jeux ?
– Je t’emmerde Saito.
– Ah, là, on se comprend ! Par contre, on va changer le moteur ; on va faire en sorte de réduire ta présence sur le projet, le Codec va devenir facultatif, et le titre va être changé.
– Attends, t’es en train de me dire que tu vas transformer un Metal Gear en un ersatz de Bayonetta, avec quelques gimmicks empruntées à ma série ?
– Ouais.
– Tu sais que j’ai envie de me barrer histoire de ne plus jamais avoir à entendre parler de toi et toute ta bande de psychopathes ?
– Ouais, mais à partir de maintenant, c’est un projet Platinum Games. Donc, tu la boucles et tu nous laisses faire.

 

C’est historique ce que tu viens d’écrire là ?

Non, pas du tout. C’est juste à ça que ressemble plus ou moins la passation de pouvoir entre Kojima Productions et Platinum Games pour le projet Metal Gear Rising. Arlésienne dont le développement a duré plus de quatre ans, après deux ans sous la houlette de Kojima Productions. Le studio, incapable de mettre à bas son titre et d’utiliser efficacement le jeune moteur Fox Engine, donne à Platinum Games une commande qui va augmenter drastiquement leur popularité. Le game designer qui va récupérer le titre est appelé Kenji Saito. je n’en ai pas encore vraiment parlé, mais il semble être l’enfant le plus talentueux d’Hideki Kamiya, bien qu’il ait un peu de mal à se séparer de ce côté « Kamiya leader price  » que je lui trouve. Il a travaillé sur le premier Bayonetta en tant que directeur du moteur, ainsi que sur le second en tant que game designer (… où il applique la formule à papa). Il a aussi dirigé Transformers Devastation (… un Bayonetta avec des Transformers), donc voilà, difficile de mettre le monsieur sur un podium. Il est encore trop jeune et n’a pas fait ses preuves selon moi. Cela dit, c’est un bon exécutant, et il a fait résistance face aux demandes de Etsu Tamari (… membre de Kojima Productions qui a chapeauté le projet avec Kenji), afin de maintenir une cohérence de la patte Platinum Games dans le projet, et d’éviter que le jeu n’aille nulle part comme au début du développement. C’est donc un monsieur qui a de bons réflexes, et qui pourrait être intéressant à suivre plus tard.

Donc, Metal Gear Rising : Revengeance, c’est un jeu Platinum Games dans l’ADN, avec des subtilités venant clairement de la patte de Kojima Productions. C’est un titre assez étrange à jouer je dois dire. Étrange parce qu’on a l’impression (… désagréable) que le jeu alterne sans cesse entre son développeur originel qui veut raconter une histoire à la Metal Gear Solid, et Platinum Games qui s’en tape littéralement. Résultat, la construction du titre est assez dérangeante, avec beaucoup de moments qui font hausser les sourcils. Heureusement, le jeu semble assumer un second degré qui est propre à l’univers de Kojima, donc ça passe, mais on n’est jamais loin de cette impression que le titre a eu un développement compliqué. On le constate subtilement dans sa narration, sa construction, et dans des choix de game design hasardeux. C’est un titre complexe et assez fascinant. C’est pour cela qu’il ne faut pas vous attendre à grand chose en y jouant ; c’est un bel objet que vous apprécierez pendant un temps, mais jamais vous n’y reviendrez comme sur un Bayonetta.

 

Une réalisation plaisante, des choix convaincants

Voilà. Merci Platinum Games : soixante images seconde sur PS3 et Xbox 360, et un portage correct sur PC. Tu as le droit à ta médaille du gentil développeur. Et si quelqu’un vient se plaindre « Ah ouais, mais le jeu est moins beau que les précédents titres du studio, et artistiquement plus plat  » , oui c’est un fait, sauf qu’il se paye un moteur physique fendard, permettant de couper nos adversaires et des éléments de décor en plein de petits morceaux. Tout le monde aime découper des trucs ; j’ai passé presque vingt minutes dans une salle à découper des bureaux et des étagères, juste parce que c’était marrant.

Par contre, la palette de couleur est au moins aussi variée que celle d’un Gris Of WarGears of War, pardonnez le lapsus que Toupilitou ne doit pas corriger (… pas toucher Toupi !), avec du gris et toutes ses variantes, un peu d’ocre, et de temps en temps une lumière bleue avec lens flare que J.J. Abrams ne renierait pas. Résultat, le jeu est plutôt terne, et ce n’est pas la moteur (Criware) de Bayonetta qui va faire sortir le jeu de ses tons déprimants. Le titre est franchement globalement tristoune, et c’est assez dommage, mais néanmoins plutôt cohérent avec la série des Metal Gear Solid qui étaient tous un peu froid visuellement. Cette palette de couleurs tranche pas mal avec une mise en scène parfois complètement dingue, avec des plans qui te découpent la rétine, alors que globalement… bah, c’est moche quoi.

Mais c’est putain de fluide, et lorsque les affrontements ont lieu, on en prend plein dans les yeux, parce que c’est bien découpé et les animations sont superbes, les bruitages percutants et les musiques… que du métal qui varie pas mal son rythme et ses sonorités, afin de rester assez dynamique, tandis que le silence devient un compagnon agréable entre chaque combat. Je mettrais même la bande-son un cran au-dessus d’un Devil May Cry ou d’un Bayonetta, parce qu’elle s’écoute aisément à l’extérieur du titre. On pourra aussi citer que les doublages sont assez appréciables, grâce à une performance des comédiens de la version anglaise qui force le respect, sans non plus convaincre comme Bayonetta avait su le faire pour moi.

 

Un scénario « à la Metal Gear  » , intrusif, et qui gave

Les idées et autres clins d’œil de Revengeance à sa série d’origine ne me dérangent pas (… sauf la composante infiltration, stupide et forcée, alors que le gameplay ne s’y prête pas, mais nous y reviendrons). Je trouve d’ailleurs le fan service plutôt correctement dosé, avec un soucis de référence dans la structure narrative plus que dans le contenu. Malheureusement, même si l’ensemble est évitable, les cinématiques et les conversations par Codec alourdissent vraiment le rythme et plombe toute la dynamique. Dans un beat’em all aussi vif et incisif que ce titre, foutre de la narration aussi appuyée, c’est pratiquement saboter l’idée de départ qui a d’ailleurs été perdue de vue, parce que je ne pense pas que Revengeance devait être aussi « bourrin  » . L’emballage narratif et tout le scénario du titre ne suivent pas par rapport au personnage que l’on incarne ; ses doutes et ses questionnements empêchent toute identification à ses idées.

D’un côté, la guerre c’est mal, de l’autre, charcuter des cyborgs en environ mille cent quarante trois morceaux ne lui pose de problèmes que dans une situation scriptée. Metal Gear Solid 4 faisait vomir le héros s’il accomplissait trop d’atrocités ; cela aurait été à propos pour notre personnage ici-présent, et l’excuse du « Il n’est pratiquement plus organiquement humain !  » ne marche pas, parce que justement, organiquement, c’est une machine, mais il a un cerveau et une sensibilité bien humaine. Et la fameuse séquence où nos gestes sont remis en question tombe à plat parce que l’excuse du « Je dois le faire parce que c’est seulement comme ça que je vais arriver à mes fins et améliorer ce monde  » ne marche pas non plus.

Enfin, c’est là où on voit les limites d’une commande à Platinum Games : il faut savoir ce que l’on veut et savoir comment orienter le projet. Là, le fantôme (… qui souffre) de l’ancien jeu de Kojima hante encore le titre et amoindri, selon moi, l’impact d’une expérience pourtant très courte et assez incroyablement rythmée. Mais, finissons d’enterrer le scénario du jeu qui, bien que porteur de certaines thématiques vraiment intéressantes (du Kojima quoi), possède des dialogues japoniaisants du plus mauvais effet, tandis que l’intérêt pour la trame baisse dès que les personnages sortent leurs répliques insupportables. On aimerait que tout ce beau monde la ferme à tout jamais pour que l’on puisse frapper des trucs. D’ailleurs, on va parler de ça, car c’est bien ce qui fonctionne le mieux malgré quelques problèmes.

 

Un système de jeu sobre, mais une exécution jouissive

Metal Gear Rising est loin, très loin d’être un jeu richissime. C’est juste une base de beat’em all solide et satisfaisante sur le plan du ressenti à laquelle on a greffé beaucoup. Beaucoup de gadgets plus ou moins inutiles, et donc plus ou moins indispensables. Mais commençons par dire que manier le héros Raiden (… qui pète la classe avec un physique pourtant androgyne ; comme quoi, tout est possible) est un réel plaisir avec une configuration de commandes relativement aisée à assimiler, ainsi qu’avec une posture active « course ninja  » rappelant la posture active d’un Assassin’s Creed. On enchaîne les coups légers et lourds avec des animations diablement efficaces, on sélectionne les gadgets comme dans un Metal Gear Solid classique, et l’on se heurte au premier grave défaut du titre : toute la partie fan service dans le gameplay est intégrée avec un burin et une masse, voire un boulet de destruction. Vous êtes en train de découper à tout va avec votre katana surpuissant, puis, deux secondes plus tard, vous devez sélectionner un lance-roquette dans des menus contre-intuitifs, avant de lourdement le manier pour enfin tirer sur la cible : s-u-p-e-r. La prochaine fois, mets même une pause active mon frère ; tu veux pas que je gère d’autres personnages aussi, tant que tu y es ?

On pourra aussi parler de la furtivité. Cela consiste à attendre que le garde fasse sa ronde, marcher vers lui quand il a le dos tourné, et le tuer discrètement… ou traverser la carte dans un carton, parce que c’est Metal Gear malgré tout. Mais sachez que c’est une approche brouillonne et insatisfaisante au possible. Prenez donc votre katana et frappez, frappez, frappez… enfin, jouez à un beat’em all de Platinum Games quoi, même s’il y a un défaut majeur selon moi. Si la palette de coups disponible est sans doute pauvre, on regrette surtout que le système de parade soit aussi stupide, et consiste à maintenir la touche d’attaque lourde en l’orientant vers l’ennemi lorsqu’il vous attaque. L’ennui est que c’est une touche que l’on passe son temps à marteler en rythme, et prendre l’habitude de faire ça à chaque attaque est très compliqué. Pour ma part, c’était impossible, et je ne parais les coups que sur un coup de chance.

Mais il faut le dire : mis à part ceci, le système de zandatsu (… couper un adversaire en morceaux dans un ralenti du plus bel effet) et le dynamisme de l’ensemble sont proprement jouissifs. Tout va très vite, et tout se fait avec une simplicité incroyable ; on maîtrise assez vite les combos, et on s’amuse vraiment beaucoup. Et c’est bien là le principal, notamment lors des phases de boss qui sont vraiment réussies, malgré un adversaire en particulier qui s’avérait particulièrement contre-intuitif à affronter. Mais, des idées glissées ici et là font que chaque boss est une vraie étape dans le jeu, et non juste un obstacle à franchir. On pourra vite fait parler du level design, ici très pauvre, qui consiste en un corridor vaguement construit pour permettre la furtivité (… très vaguement), et qui ne permet que peu d’exploration. Toutefois, il renforce un rythme de fou qui fait que, à l’instar d’un Vanquish, quatre ou cinq heures suffisent à terminer le jeu. Mais quelle satisfaction, quel sentiment quand on le termine ! Un vrai rail de dynamisme et de plaisir de jeu pur, à peine éraflé par quelques défauts de conception qui ne viennent pas forcément de Platinum Games.

 

Certes, il n’est pas légendaire, il n’est pas long, et on y reviendra probablement que pour une partie d’une demie heure tous les six mois. Mais bordel, quelle courte et intense expérience ! Là, pour le coup, on se prend une grosse claque, et on laisse le boîtier de côté sans jamais oublier à quel point on a pris son pied. Alors oui, ce n’est pas un Bayonetta, ni même un Devil May Cry, mais pour peu que vous soyez capable de passer à côté de ses quelques cicatrices de conception douloureuse, Metal Gear Rising : Revangeance, c’est l’histoire d’un héros qui pète la classe, et qui va couper des machins dans tous les sens sous du métal bien vénér’ pendant cinq heures. Et ça, c’est pas tous les jours qu’on y a droit !

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A propos de l'auteur : Marcheur

Enfant attardé de Kreia et d’Alfred de Musset. Pense que tout est narration, et répète sans cesse qu’il donne tout en dansant comme un ouf

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