Hotline Miami

Enfin, de l’air ! Nom de nom, après avoir rédigé la critique la plus longue que j’ai eu à écrire depuis que je publie sur ce site, je devais me donner un moment de répit, et parler d’un titre un peu moins gargantuesque. Il est vrai qu’après avoir dépassé les 4000 mots sur Fallout 4 et The Witcher 3, mon cerveau commençait à bouillonner. Mais le prochain ? Il me fallait me ressourcer, libérer tout cet amour du travail dantesque dans un jeu plus léger, plus défoulant… Mais pas bête pour autant ! Aujourd’hui, c’est le pixelisé Hotline Miami que je mets à l’honneur. C’est parti pour quelques petites heures de meurtres malsains (… pléonasme ?), de musiques qui flirtent avec vos sens troublés par quelques substances, et une bonne grosse dose de plaisirs primitifs. Je suis un poulet.

 

 

Un visuel crade et efficace

Dès que la PS Vita fut dans mes mains, j’ai su qu’elle était faite pour les jeux indépendants. Avec sa puissance remarquable et son écran magnifique, elle s’avérait parfaite pour les jeux moins ambitieux que les triple A. Quoi de mieux qu’une machine portable pour jouer à des jeux, dont le but est avant tout de proposer un système de jeu plutôt qu’une histoire travaillée ou des cinématiques léchées ? Pas que je rejette ce type de jeux s’ils viennent se perdre sur la PS Vita, mais pour moi, une portable doit proposer un plaisir immédiat. Tuer des gens en fait vraisemblablement partie, vu les ventes de Call Of Duty.

Et Hotline Miami était parfait pour cela. Dès les premiers instants, les pixels arrivent et son design rétro s’avère bien plus réussi sur un petit écran. Tout à fait coloré, tout à fait détaillé, Hotline Miami paraît rétro sans grandes idées au premier abord, mais son visuel cradingue s’accorde parfaitement à son ambiance, à sa direction artistique, à son gameplay même. Hotline Miami est un jeu qui offre une esthétisme adaptée à son game design, et c’est quelque chose que j’apprécie. Quelque chose d’agressif à l’œil, pour quelque chose de réactif et viscéral, commandes en main. Au niveau des environnements, vous n’explorerez par contre que des intérieurs.

Bien sûr, techniquement, le jeu ne met pas à genou la machine. C’est fluide, mais cela ne profite d’aucun effets clinquants. Si on ne peut pas critiquer l’efficacité de sa direction artistique, force est d’admettre que j’ai du mal à accepter un tel visuel en 2014. Alors, cohérence avec le parti pris du jeu, d’accord, mais quand même, cela fait peine à voir le pixel art. Eh oui, je sais que le jeu a été créé par deux frères, mais je peux rétorquer que Ori And The Blind Forest a été fait par quatre personnes, qu’il est sans doute deux fois plus cher, mais techniquement il était magnifique début 2015. Donc, l’excuse passe mal. Qu’importe, parlons du truc qui fait le plus triper dans ce petit jeu. Je suis un tigre.

 

 

Cette musique me rend fou, mais fou

Hotline Miami, cela se joue avec un casque les amis, et ce pour plusieurs raisons. Déjà, le son qui sort de la PS Vita rend bien, mais pas non plus de quoi crier au génie. Ensuite, la musique, qui est à 100% électro, permet de parfaitement apprécier le jeu et sa jouabilité. Qu’est-ce que je raconte ? Simplement que le rythme, et le caractère psychédélique de celui-ci, nous fait rentrer dans la même condition que notre personnage ; dans un état second duquel on ne ressort qu’après avoir accompli la tâche. On peut littéralement vivre le jeu au rythme des basses. N’est-ce pas là une merveilleuse perspective ? Pour l’avoir vécu le long des dix neuf niveaux qui composent le jeu, je me suis surpris à ne plus penser à ce que je faisais. Un état de folie inconsciente troublant, en grande partie grâce à la direction artistique visuelle, et à cette musique de fou.

On ne fera pas les mêmes éloges des bruitages, qui rappelleront aux plus anciens leurs bonnes vieilles consoles des années 80 – 90. Ah c’est sûr, les nostalgiques adoreront, mais ceux qui n’accrochent pas n’auront que leurs yeux pour chialer devant des bruitages qui manquent de clarté et de percutant. Dommage, parce que la musique nous emmène si loin qu’on aurait aimé – peut-être – ne pas du tout avoir de bruitages ? Cela me paraîtrait cohérent par rapport à cette perte de repères du conscient, mais c’est très subjectif. De plus, rien que l’effet de la musique sur le cerveau du joueur est un exploit exceptionnel. Je suis un rat.

 

 

Souille ton âme du vice de tes victimes

Obscur dans son approche de l’histoire, Hotline Miami prétexte étrangement son scénario, mettant en scène de très étranges personnages masqués, dans des dialogues volontairement vagues. Les dialogues du jeu sont non-doublés, et l’ensemble ne laisse entendre que la musique. C’est parfaitement en accord avec l’ambiance du jeu, qui amène le joueur à se demander si tout ce qu’il fait est vide de sens, ou si, quelque part, il agit de manière sensée ? Le flou est intéressant. Le manque de clarté dans la narration et l’absurdité des missions permettent de se mettre efficacement dans la peau d’un malade mental qui ne se sent en vie que lorsqu’il égorge, éviscère, transperce, tranche, et démembre ses victimes. Ouais ; ne vous attendez pas à un jeu tout public, malgré ses airs pixelisés. La violence de Hotline Miami est tout à fait perceptible. Soit dit en passant, saviez-vous que la France a engrangé plus de 15 milliards d’euros avec l’industrie de l’armement en 2015 ?

Violence qui permet d’ailleurs de souffler entre une transition de chapitre, dont l’ambiance malsaine ne fait que s’amplifier au fur et à mesure. Surement en train de perdre le contrôle, notre héros se met à voir des choses macabres… voire à parler à ses victimes ? Tout cela pour dire que Hotline Miami n’est pas un jeu littéraire, ni très profond, mais la brume qui entoure son univers et son contexte s’accorde à merveille avec son ambiance délicieusement folle, dans le sens littéral du terme. Si le but du jeu était de nous conduire dans les recoins les plus sombres de l’âme humaine, pour en révéler toute la démence et les instincts meurtriers, c’est réussi. Je suis un cheval.

 

 

Crève pour satisfaire mes pulsions, I.A. stupide

Cru. Voilà. C’est la meilleure manière d’introduire quelqu’un à l’ensemble d’Hotline Miami. Si vous êtes amateur de stratégie, de réflexion quelconque, ou même d’anticipation, je vous conseille de passer votre chemin. Pour les autres amateurs du skill, ou du talent de jeu pur et dur qui nous habite, soyez les bienvenus dans un jeu qui va extirper non pas un skill conscient, mais celui qui vient des tripes. Vous vous êtes déjà retrouvé frénétique ? Avec l’envie de frapper jusqu’à ce que vous repreniez vos esprits ? Vous avez déjà saisi le concept du flow dans toute activité ? Eh bien je vais essayer de vous l’expliquer. Le flow, c’est la maîtrise parfaite d’une activité qui conduit à un état d’ivresse où l’action de l’individu devient inconsciente. Le flow ne fonctionne que dans la cas où la personne ne commet aucune erreur, et à la moindre erreur, cette sensation se transforme en frustration intense.

Cet état second est un état que vous devrez atteindre afin d’apprécier Hotline Miami. Vous vous énerverez, et vous aurez envie de tout détruire en mourant de nombreuse fois. Mais vous pouvez recommencer à volonté, reprendre votre masque de tueur, trouver de nouvelles armes, et de nouveaux moyens de tuer vos ennemis. Improvisez, soyez créatif, libérez la bête qui ne demande que du sang, celle qui sommeille en vous. Vos moyens pour tuer vos ennemis seront nombreux : armes de corps à corps, armes à feu, lancer d’armes, exécutions brutales désarmées, portes que vous claquerez dans la tête de vos adversaires… Les moyens sont nombreux et rapportent des points. Notez que la maniabilité hasardeuse accentue le degré de frustration du jeu.

Le jeu ne comporte pas que des phases de massacres. Il y a des moments qui découpent le rythme de l’histoire. Par exemple, les phases de boss sont plutôt réussies, dans le sens où elles nous forcent à trouver le point faible unique d’un adversaire.  Cela va très vite, c’est frustrant, ça demande des réflexes de folie, mais cela nécessite de mourir pour comprendre le fonctionnement. Il y a aussi une phase d’infiltration dans le jeu… oui, elle est ennuyeuse, et particulièrement casse-couille. Mais elle existe, donc, je la signale.

Ce gameplay permet au jeu de prendre encore plus de sens dans ses parti-pris. La folie est de mise ; ne vous contrôlez plus, arrêtez de réfléchir à un plan, foncez, tuez, réessayez, jusqu’à ce que le jeu délivre son générique et vous libère de cette folie qui vous habite. Quatre à cinq heures cathartiques, c’est ce qui attend le joueur qui se lance dans le voyage que lui offre Hotline Miami. Je le conseille à un public averti, mais ne passez pas à côté de ce chef d’œuvre dont les imperfections servent le propos. Il y a quelque chose d’effrayant en vous que vous n’avez peut-être jamais découvert, et qui mériterait peut-être d’être vu une seule et unique fois, avant de l’enfouir dans le ça de votre cerveau. Ou peut-être aimeriez-vous replonger dans sa suite, Wrong Number ? Seul le « vous » inavouable saura vous le dire. Ah, et n’oubliez pas, seuls les humains sont assez mauvais pour donner naissance à des tueurs en série. Je suis une girafe.

 

 

C’est plus bon qu’il n’y paraît de sortir de ses gonds sans faire souffrir vos proches, sans risquer de détruire quoi que ce soit chez soi. C’est ce que m’a fait découvrir Hotline Miami. Sans grande prétention au premier regard, il s’agit d’une expérience profonde qui nous fait comprendre ce qu’il y a de plaisant dans la destruction et la contemplation scabreuse du mal. Si vous voulez connaître ce qu’il y a de plus bestial chez l’homme, sans doute Hotline Miami est le meilleur moyen de le découvrir sans trop faire de mal, hormis à des tas de pixels. Je tiens à dire que le jeu ne doit être mis qu’entre des mains averties. Son effet est en effet bien réel et hypnotique. Je suis un animal.

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A propos de l'auteur : Marcheur

Enfant attardé de Kreia et d’Alfred de Musset. Pense que tout est narration, et répète sans cesse qu’il donne tout en dansant comme un ouf

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