Kingdom Come : Deliverance

Kingdom Come : Deliverance

Version presse Xbox One fournie par Koch Media (qui fait désormais partie de la galaxie THQ Nordic ; comment j’aime ces mecs !)

 

L’année 2017 est bel et bien finie. On peut désormais passer avec enthousiasme à une année 2018 qui n’a pas commencé avec l’annulation de Scalebound, ce qui en fait de facto une année dont l’ouverture m’est bien plus agréable que la précédente. Je commence l’année plus ou moins sur des chapeaux de roue avec l’arlésienne de Warhorse Studio, des développeurs tchèques dont on attendait plus vraiment leur création médiévale ultra-ambitieuse, dont chaque nouvelle me décrochait un sourire d’amusement tant je ne croyais pas en ce projet.

Finalement, en grand spécialiste des jeux cassés / mal finis, je me suis permis de croire que j’avais le bon profil pour critiquer ce titre en particulier, et me jeter dans ce grand bain médiéval basé sur des évènements historiques ainsi que des grands personnages de l’histoire tchèque. Si de loin le programme s’avère alléchant avec des promesses d’un univers médiéval adulte, réaliste, et impitoyable, restait la crainte d’avoir affaire à un jeu au mieux médiocre, au pire complètement raté. Néanmoins, maintenant, j’ai matière à dire que Kingdom Come Deliverance m’a surpris, et quelque part, ce n’est que justice, car je n’en avais pas vu grand chose avant qu’il me parvienne. Warhorse Studio est une équipe dans laquelle on peut désormais avoir confiance pour redresser le navire chancelant du RPG occidental à moyen / gros budget.

 

« Tu quoque mi fili  » avec son histoire plus que largement basée sur le mono-mythe à la structure tout à fait classique, voire prévisible, Kingdom Come nous installe confortablement dans les bottes d’Henry, un gaillard pas bien charismatique avec une tête qui ne donne pas envie de le respecter, ni de le câliner. Au mieux, on préférerait lui foutre la tête dans la boue. Pas de personnalisation ici ; notre ami est et restera le moche, le héros dont le visage ne nous revient pas forcément comme particulièrement remarquable. Toutefois, il a un passé, une histoire personnelle, des connaissances. Il est donc normal qu’au cours d’une introduction longue, superbement mise en scène, et d’un rythme impressionnant, il finisse par perdre ce pour quoi il se levait au quotidien : sa terre d’attache et ses repères de jeune homme. Henry nous est finalement laissé pour mort, comme un enfant qui a franchi le douloureux pas vers l’âge adulte sans crier gare, et qui doit se retrouver en face d’une vie qu’il a subi plutôt que choisi. C’est dans les bottes de ce gaillard que vous allez subir une histoire, puis en prendre lentement le contrôle, dans le rôle que vous allez prendre.

Dans sa construction et sa narration, Kingdom Come a beaucoup à voir avec un The Witcher 3, notamment via la liberté offerte pour incarner Henry qui le met déjà un très large cran au-dessus de ce dernier dans la catégorie jeu de rôle. Si l’on est contraint d’être l’homme qu’il est, rarement le jeu vous forcera à agir de la manière dont il considère son propre protagoniste ; vous êtes globalement aux commandes, même si l’histoire pose tout de même un certain cadre à l’aventure. Cet équilibre, entre la nécessité d’offrir aux joueurs une histoire scénarisée et de lui proposer une assez grande liberté, est ici plutôt bien trouvé, et je n’ai jamais pris autant plaisir à suivre une histoire linéaire dans un jeu en monde ouvert. Pourquoi ?

Parce que là où des rails grossiers nous contraignaient dans The Witcher 3, tout ce que fait Kingdom Come pour nous maintenir dans le flot est plus subtil et plus engageant. Au diable les sens de sorceleur qui te font renifler du sang ou des excréments pour arriver au final à un affrontement ; Kingdom Come a des objectifs variés, des activités logiques, et un contexte d’une cohérence impressionnante. Vous pensiez que CD Project avait de l’amour pour ses jeux ? C’est juste. Mais Warhorse Studio fait de cet amour une forme de fascination qui donne vie à Kingdom Come, et ce d’une manière tout à fait divine. Je vous ai déjà dit à quel point il m’était difficile de ne pas courir ou faire de voyage rapide dans la plupart des jeux ? Dans Kingdom Come, je me l’interdis, tant le monde est fascinant, dense, logique, crédible, et terriblement immersif. Des détails stupides font de ce titre un jeu merveilleux. Le simple fait de se prendre un pont lorsque l’on passe en dessous de celui-ci à cheval nous désarçonne. Rares sont les jeux à vous proposer ce genre de chose.

C’est simple : on peut marchander, persuader, intimider, crocheter, fureter, devenir un criminel… Bref, il y a une vraie grande liberté, et si le jeu doit composer avec quelques concessions pour se rendre agréable, il garde chaque fois l’équilibre entre logique et ludique. Je pourrais parler longtemps du charme qui s’opère lorsque l’on commence à prendre en main cet univers, mais ce ressenti a quelque chose de neuf et de profondément nouveau. Je ne sais si je manque d’expérience encore dans le milieu du RPG, mais le seul jeu qui se rapproche de ce ressenti – et on en est pourtant très loin – c’est Mount And Blade. Kingdom Come est proche de quelque chose sur un continuum entre un jeu Piranha Bytes et Mount And Blade. Pourtant, une fois le pad entre les mains, je suis incapable de savoir si j’ai vraiment l’impression d’y voir un mélange d’influences. Il y en a dans Kingdom Come, mais très franchement, elles sont tant digérées et réfléchies dans le contexte du jeu que j’en suis venu à juste me dire : c’est un nouveau sous-genre.

Car, dans Kingdom Come, il faut se nourrir, dormir, soigner ses blessures sinon elles deviennent handicapantes, il faut veiller à ne pas bousculer les gens, vendre des objets volés éveille les soupçons du marchand qui vous en demandera bien moins, créera une rumeur qui fera soupçonner les gardes de votre bonne foi et entraîneront des fouilles. C’est vivant. Dieu que c’est en vie comme univers ; on peut parler à beaucoup de personnages, tandis que chasser le cerf vous est interdit car vous n’êtes pas de sang bleu. C’est con hein, mais c’est logique. On est au Moyen Âge, vous savez, cette époque où c’est le sang de la lignée qui détermine le futur, où la noblesse n’a pas mot à dire sur son destin, et où le jeu nous en fait prendre conscience avec un jeune noble tout à fait détestable que l’on apprendra à connaître d’assez naturelle manière.

Car du naturel, Kingdom Come n’en manque pas une seule seconde. Ses missions et ses personnages nous parviennent avec une logique telle que l’on ne peut que s’intéresser à la proposition narrative. On apprend à découvrir les personnes qui composent ce monde avec de vrais moments d’intimités, pas des missions où l’on va sauver la veuve et l’orphelin, mais parfois juste une ronde, une balade champêtre, une partie de chasse, une bagarre dans une taverne… Bref, ça vit. Et ça arrive à vivre même si l’on est dans un jeu qui se narre beaucoup (trop) par des cinématiques. Néanmoins, vu la qualité de ces dernières, on s’y fait sans trop de mal, même si pour les cinq premières heures, la manette n’est que peu utile.

L’autre point qui m’a relativement surpris, c’est la qualité des quêtes secondaires qui vous seront proposées. Il y en a déjà en assez grand nombre, mais en plus elles sont vraiment intéressantes, et laissent souvent beaucoup de liberté aux joueurs, tout en étant souvent mises en scène avec grand soin. Je n’ai pu m’empêcher d’être surpris lorsqu’au milieu d’une quête une cinématique bien réalisée venait soutenir la narration, ou même parfois des ellipses menant à des événements jouables qui donnent un caractère imprévisible aux quêtes. D’ailleurs, c’est bien le mot qui définira le mieux Kingdom Come dans l’écriture de ses arcs secondaires : imprévisible. Si la quête principale ne laisse que peu de place à la fantaisie, attendez de voir les quelques aventures à côtés de la grande histoire qui vous seront proposées ; de quoi réellement donner naissance à des moments inoubliables.

S’il ne met pas forcément l’accent dessus, quelques événements aléatoires viennent dynamiser ici et là les voyages rapides ou même vos balades. Bien que le rythme du jeu soit lent et immersif (réaliste en fait), il arrive toujours à nous proposer un petit quelque chose pour éveiller l’intérêt. En ce sens, la carte – pas si grande – est une belle invitation au voyage, et l’on y trouve quelques activités secondaires qui, loin d’être surexploitée, donnent envie de tout découvrir. N’allez pas croire que vous rencontrerez trois cent camps de bandits, ours à chasser, château à libérer. Non, Kingdom Come est crédible, et c’est finalement grâce à cela qu’il rend ses découvertes précieuses.

Maintenant que vous avez compris que Kingdom Come est superbement écrit, propose un univers cohésif et immersif, et que l’on se sent comme dans une autre vie dans les bottes d’Henry, nous allons parler rapidement de la version console du jeu, et plus précisément de la version Xbox One. Alors oui, le jeu n’est pas visuellement parfait ; il y a de l’aliasing, la distance d’affichage n’est pas parfaite, certaines textures sont appauvries, mais au global, j’ai trouvé le jeu très proche du rendu que j’ai vu dans certaines images fournies par les développeurs. Certaines zones sont vraiment superbes, avec une belle composition des paysages et de la nature. Les zones qui souffrent le plus des limitations de la machine sont évidemment les zones urbaines. Ce n’est pas seulement que le framerate en devienne instable, c’est plus que les textures ont du mal à s’afficher à mesure que l’on se rapproche d’elles.

Ces retards d’affichages sont en plus accentués par un traitement des textures à distance assez pauvre. Le plus surprenant, c’est qu’à côté de cela, les détails des ombres, même à assez grande distance, sont plutôt fins, ce qui laisse supposer que le moteur ici présent (le Cry Engine) n’est pas aussi souple qu’un autre ; ce sont des défauts techniques que j’avais constaté sur Homefront : Revolution déjà. A côté de ça, les modélisations soufflent le chaud et le froid, tandis que les animations sont très insuffisantes, bien que le travail sur le doublage français (… souffrant malheureusement de beaucoup de bugs et soucis de traduction, comme le fait que le héros dit parfois des trucs du genre « je recommence là ?  » ) est objectivement, en dehors des problèmes de finition, excellent.

Je ferais d’ailleurs à ce propos une mention spéciale à l’homogénéité du jeu des acteurs : la direction de ces derniers a été faite avec grand professionnalisme, ce qui peut surprendre lorsqu’on sait que le jeu n’a pas un si gros budget et est surtout une nouvelle licence. Warhorse Studio ne s’est pas moqué du monde, carrément pas même.

Donc, la version console, ça passe. C’est mieux sur PC, parce que le système de crochetage a été pensé pour la plateforme de l’élite, mais sur console, ça passe. J’ai joué à bien pire, et Warhorse fait bon usage des capacités de la machine. J’ai néanmoins un peu mal au crâne après des sessions de cinq heures d’affilée sur le jeu (… mais bon, je le rappelle, passer cinq heures d’affilée sur un jeu, c’est pas une super idée ; beaucoup le font, mais ça craint) parce qu’un jeu en première personne qui toussote pour atteindre le 30 images secondes… Ouille.

Maintenant, est-ce que l’on est en face d’un jeu qui est agréable à jouer ? Alors, personnellement, je dirais oui, vraiment oui. Même le système de combat d’une technicité remarquable ne me dérange pas ; je me fais latter les couilles, mais j’aime ces rixes longues et intenses, qui cela dit sont déconseillées en dehors des duels. Car oui, dès que vous avez plus d’un adversaire, vous êtes pratiquement sûr d’y laisser la peau. On aimera ou on aimera pas, mais Kingdom Come est un jeu qu’il faut aborder dans toute sa complexité, avec ses restrictions dues à des choix de game design parfois très discutable (naviguer avec le cheval s’avère un calvaire parce qu’il NE SAUTE PAS AU DESSUS DES OBSTACLES AUTOMATIQUEMENT !), et si j’ai un conseil à vous donner c’est : lorsque vous ne vous en sortez pas l’épée à la main, n’hésitez pas à user de l’arc.

Toutefois, même ce dernier est complexe. Tendre la corde demande de l’endurance, que l’on consomme aussi pour donner des coups, esquiver, sauter, et courir. Si vous avez déjà tiré à l’arc, vous savez à quel point c’est capricieux, tant dans le comportement de la flèche que dans le maintien du tir, ou bien avec la tension de la corde. Kingdom Come prend en compte ces paramètres et offre une visée technique, sans indices, sans trop de concessions. J’aime beaucoup, car sachant pertinemment qu’un arc d’époque c’était : pas d’aide à la tension de la corde, pas de viseur, parfois un déséquilibre de l’arc, eh bien on s’adapte. Et finalement, on s’y fait parfaitement, et en combat, j’aime pouvoir aborder la situation à distance, car j’ai du mal avec le combat au corps-à-corps. Mention spéciale à la chasse, où j’ai pris grand plaisir à voir mon œil s’habituer à la visée, qui dépend également de la position de notre personnage par rapport à sa cible. Ça a l’air bête, mais ce supplément de réalisme contribue au caractère ludique de la chasse.

Vous avez aussi la possibilité d’aborder les situations avec discrétion ; une belle manière de régler les problèmes sans prendre trop de risques, sachant que la seule approche qui force à tuer pour se débarrasser de vos adversaires, c’est l’approche à l’arc. Même au combat à l’épée, vous avez le choix de ne pas tuer l’adversaire, en cela, le jeu est réaliste, car au Moyen Âge, il valait mieux faire du vaincu son vassal qu’un cadavre. Évidemment, la mort n’est pas étrangère aux combats médiévaux. Il y avait juste des règles dans la guerre, du moins dans les combats de nobles.

Je me mets désormais à la place de quelqu’un qui vient chercher dans Kingdom Come un Skyrimlike. Franchement, partez, loin. Ce n’est clairement pas un jeu qui vous laisse explorer à votre guise, entasser de l’équipement ou autre ; c’est un jeu avec des ambitions de simulation / survie assez soft, mais tout de même suffisamment marquées pour que vous deviez faire avec. Lorsque vous êtes fatigué, votre barre d’endurance se réduit, de même lorsque vous avez faim, avec vertiges à la clé. Les aliments doivent être assez frais pour être consommés, sinon ils vous rendront malade. Un coup reçu peut vous faire saigner. Les armes et équipements ont une durabilité, et les blessures sont visibles sur les personnages. De même, lorsque vous demandez à quelqu’un de venir faire une balade (dans le cadre d’une mission), il peut refuser, parce que dehors il pleut des cordes. Bref : vous êtes conditionnés à la vie des autres et devez vous adapter.

C’est ce simple fait que ne pas respecter un emploi du temps strict et ne pas respecter la vie sociale dans laquelle vous vous intégrez qui fait que le jeu est vivant. Vous pouvez vivre une vie d’ermite, c’est possible, mais si vous revenez à l’histoire, on pourra vous le faire remarquer. Bien sûr, les conséquences sont encore limitées, mais cela a été pris en compte ; si vous ne vous investissez pas pleinement dans ce que l’on vous demande, vous serez traité à l’image de votre comportement. Dommage que tout ceci soit parfois si dépendant de l’histoire, de scripts, et donc de la trame principale, mais tout de même, il y a quelque chose de magique à se faire rabrouer parce qu’on a fait de la merde, parce qu’on a voulu prendre des libertés. On a l’impression que l’environnement n’est pas à notre service, mais existe en lui-même.

Kingdom Come fait d’ailleurs son possible pour raréfier la dissonance ludo-narrative. C’est une entreprise d’autant plus courageuse qu’elle se situe dans un monde ouvert, bien que cela donne une continuité à l’action, et l’on peut entrer partout sans temps de chargement ; tout se passe assez dynamiquement. De même, des détails comme la pluie qui affecte le paysage en créant des flaques est un élément qui encre d’autant plus le joueur dans son monde.

Contrairement à d’autres, Kingdom Come propose des choix avec conséquences, même s’il essaye de maintenir sur pied son histoire. On se sent impactant dans ce monde, et donc utile sur une échelle parfois assez limitée, mais c’est le jeu. C’est la réalité du monde que vous arpentez. On pourra donc pester sur sa finition, sur son système de crochetage lourdingue, sur son IA parfois limitée, sur ses espaces de vide, sur le sentiment de ne pas être grand chose, ou encore sur la narration trop poussée pour le bien du jeu, mais au final, on est en face d’un grand jeu, dense, long, varié, crédible, et ludiquement intéressant du fait de sa proposition si singulière.

Maintenant, l’ensemble de petits défauts ici présents font qu’il est aussi un titre imparfait, et sa générosité se heurte parfois aux limites de ses propres choix. Le fait d’être libre et parfois tant guidé peut créer des frustrations qui sont dépendantes de chacun ; le personnage imposé peut relativiser le côté roleplay, ou le simple fait qu’il s’exprime souvent sans qu’on lui en ait donné l’autorisation est frustrant. Lorsque le monde entier réagi de son mieux à nos actions et qu’on se sent tant intégré dans celui-ci, on se dit que, finalement, même si notre place dans celui-ci nous est imposé, le soin qu’il met à nous laisser des libertés dans ce cadre me fait finalement reconsidérer comment il est possible de concevoir un jeu de rôle.

D’ailleurs, s’il est relativement réaliste, le jeu n’oublie pas de proposer son lot d’objets à fabriquer soi même, ou même l’apprentissage de la lecture et d’autres subtilités, évoquant avec grand plaisir l’évolution que l’on connaît dans un jeu Piranha Bytes. C’est bête hein, mais j’ai un petit plaisir dans ce titre : braconner et récupérer des champignons. Là où ça m’emmerde dans un Witcher 3 parce que les combats me paraissent froids et déjà joués, et aussi parce que je ne supporte pas de ramasser des trucs dans ce jeu (le positionnement de Geralt, c’était un calvaire, bordel !), dans Kingdom Come, le simple fait de savoir que cela améliore mes compétences me fait accrocher à cela. Par ailleurs, étant donné que les forêts ressemblent à de vraies forêts, j’ai un immense plaisir à m’y perdre.

Kingdom Come : Deliverance, c’est le jeu qui a réussi à me faire apprécier des notions de jeu de survie avec des besoins vitaux, le jeu qui m’a fait accepter un système de soins contraignant, et même un système de sauvegarde manuel frustrant. Mieux : le jeu qui m’a fait voir que, malgré un cheminement quasiment imposé, on peut en effet bâtir un jeu de rôle sur une base commune. Il suffit juste d’y aller franco, et qu’une fois le personnage solidement établi dans ce qu’il a de propre, on laisse suffisamment son mot à dire au joueur pour qu’un Henry devienne notre Henry. Un feeling que je n’ai jamais eu avec Geralt de Riv. Ah, et les nuits noires… Dieu qu’elles sont sublimes. Une vraie invitation à aborder l’univers du jeu à n’importe quelle heure, sachant que nous avons la possibilité d’attendre que les heures passent, à l’instar d’un Elder Scrolls.

Je garde cette ultime partie pour nuancer mon propos global sur le titre. Oui, Kingdom Come Deliverance est un RPG marquant qui marquera d’une pierre blanche l’histoire du genre. Malgré tout, il reste un jeu plus que hautement perfectible, car dans ses ambitions souvent trop importantes, le titre manque de sagesse. Les développeurs l’ont admis : ils auraient apprécié avoir plus de temps pour peaufiner leur jeu. Il reste jouable hein, mais les bugs sont par paquets de dix, et bien qu’ils ne soient pour la plupart pas bloquants, ils restent suffisamment présents pour ternir l’expérience. On pourra aussi signaler des concessions parfois très brutales au réalisme (par exemple, ces lapins qui ne réagissent pas lorsqu’une flèche vient se ficher à côté d’eux), des quêtes qui virent fréquemment vers le surnaturel, des affrontements souvent déséquilibrés, un système d’évolution qui laisse parfois peu de choix pour se spécialiser malgré sa souplesse… Kingdom Come est un jeu qui additionne beaucoup de choses pour en faire une recette tout à fait unique. L’ennui est qu’il souffre de la jeunesse de son concept et du trop plein de confiance que les développeurs ont eu en leur titre.

Cet amour est une bonne chose pour le ressenti du jeu ; on a vraiment l’impression d’être devant ce que rêvait de faire l’équipe tchèque, mais reste beaucoup de soucis d’équilibrage et de finition méritant un passage par la case mise à jour. Aussi, on se prend à rêver que Kingdom Come Deliverance se fende d’un mode hardcore, troquant ses concessions pour une expérience impitoyable, encore moins permissive, quitte à permettre les sauvegardes libres pour l’expérience non « hardcore  » . On est donc en face d’un jeu long, fascinant, parfois troublant. En effet, le soucis du détail peut désarçonner un joueur trop habitué aux jeux dont on connait déjà la formule, mais on est aussi devant un jeu qui manque encore d’un peu de maturité, mérite encore un peu de temps, et sans doute une suite pour devenir un exemple à suivre pour l’industrie.

J’ai donc trouvé Kingdom Come : Deliverance remarquable. Courageux au point d’en être sot, et généreux au point d’en faire trop. Il y a dans ce titre le grand écart entre un jeu fait main par des artisans, et l’ambition de montrer les crocs face aux plus grosses productions. Le titre est donc assurément l’un des jeux les plus marquants de la génération, et constitue bien, à l’inverse d’un The Witcher 3, un véritable tournant dans la manière dont on conçoit le « Action  » -RPG. Embarquant avec lui une armée de défauts de finition et de choix de game design parfois curieux, souvent réfléchi et cohérent, le jeu tchèque se pose là en véritable alternative à une vision souvent réductrice du RPG.

 

Réhabilitant la notion de choix et conséquence par le biais d’un système de sauvegarde malin, un monde ouvert diablement cohérent, travaillé, et intéressant à explorer, le jeu fait aussi de son mieux pour proposer un système de combats des plus exigeants et intéressants. Seulement, c’est avec ce trop plein de bonnes intentions que vient le revers de la médaille : à force d’avoir voulu faire plus et différemment de tous les autres, Kingdom Come : Deliverance est souvent maladroit, mal fini. Pourtant, ce constat se conjugue avec l’impression d’être devant quelque chose de résolument neuf, qui crache à la figure du cahier des charges classique, et propose un nouveau regard sur le genre.

On pourra le comparer autant que l’on veut à un Mount And Blade, à un The Witcher 3, ou même à un Piranha Bytes, la conclusion reste la même : c’est différent. Et parce que c’est différent et vraiment réussi, c’est d’ores et déjà culte. Et parce que c’est d’ores et déjà culte, il faut suivre et soutenir le studio Warhorse Studio, qui vient de faire en un seul jeu un classique qui mérite que l’on en parle, pour le critiquer, pour le louer, mais surtout pour le faire vivre, avec cet espoir grandissant que quelque chose peut changer dans le monde du RPG. Avec Kingdom Come : Deliverance, Elex, Divinity : Original Sin II, et Prey comme ambassadeurs, le RPG est sans doute en train de connaître la renaissance que l’on avait prophétisé en 2014. Quel beau début d’année.

 

Nota Bene : Oui, Kingdom Come : Deliverance, ça déchire tout, mais laissez quand même passer un ou deux mois ; vous ne perdez rien à attendre, et aussi parce que le jeu fait déjà un carton. Donc, ne vous faites pas avoir par l’engouement (même si je n’aide pas), et prenez le temps d’attendre des patchs, histoire que vous soyez d’autant mieux transporté par le merveilleux jeu de Warhorse Studio.

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A propos de l'auteur : Marcheur

Enfant attardé de Kreia et d’Alfred de Musset. Pense que tout est narration, et répète sans cesse qu’il donne tout en dansant comme un ouf

9 Commentaires sur “Kingdom Come : Deliverance”

  1. Ninheve dit :

    Perso plus j’y joue et plus je l’apprécie, je vois ce jeu comme quelque chose avec un énorme potentiel, il y a des maladresses mais elles n’empêchent pas d’y prendre plaisir.
    J’espère que Warhorse continuera sur cette lancée et qu’il y a aura une suite à ce jeu, où ils auront maturé leur univers et leur gameplay. Bref, après un début qui me laissait dubitative , j’apprécie finalement notre petit Henri qui a bien la tête de l’emploi, monsieur tout le monde pris dans la tourmente

  2. flofrost dit :

    C’est ça, un énorme potentiel, ce jeu c’est de belles promesses pour l’avenir, surtout qu’il ne faut pas oublier que c’est une première pour le studio.
    En revanche et ça devient une habitude, ce jeu se traine une belle bande de fans illuminés qui ne supportent pas la moindre remarques, allant même jusqu’à nier les bugs que certains peuvent avoir, pourtant problème reconnu par les dév, en plus on sait tous très bien (enfin quand on a un cerveau en tout cas) que c’est la roulette russe avec les configs et notamment avec les cartes graphiques. D’ailleurs il serait peut être temps de pointer du doigt Nvidia et AMD également, plutôt que de concentrer les critiques quasi exclusivement sur les dév (qui ont leurs responsabilités aussi soyons clairs), car c’est systématique, on a pas un jeu sorti dernièrement qui n’y a pas eu droit.

    Ah et sinon, quelqu’un sait ou trouver ces satanés chevreuil ?!

  3. Marcheur dit :

    Bah il va se payer la même bande de fanatiques extrémistes de The Witchiant (ceci est un troll gratuit, alerte, j’aime bien la série Witcher, ne m’attaquez pas !) et les bugs sont bien là, j’en ai d’ailleurs un beau : le peuple de Sasau me hait depuis que j’ai dormi dans la grange d’un meunier local, ce con m’a réveillé puis a voulu me cogner, je l’ai défoncé (sans le tuer) et le bougre fait courir le bruit que je suis un grand malade. Malgré tous les services rendu depuis, tous ces connards de pécores me haïssent.

    Bref, un jeu génial, trop pour ne pas devenir sujet de culte, et trop buggué pour ne pas être marquant, on en entendra parler encore longtemps et les mises à jour à venir pour ce titre le feront vivre un paquet d’année.

    Ah et Breaking News… ARKANE A TEASE UN ADD-ON POUR PREY ! WOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOH !!

  4. flofrost dit :

    Vu le « succès » qu’a connu Prey, cette nouvelle est vraiment étonnante.

    Moi depuis un petit moment je peux plus voir Henry dans le menu d’équipement, c’est juste une ombre, une silhouette, pas pratique pour savoir la tronche que t’as avec ton nouveau matos. J’ai aussi une quête impossible à terminer, (diffamation) j’ai ramené le « trésor » au propriétaire légitime plutôt qu’à celui qui m’avait parlé de cette histoire, et désormais les deux sont toujours indiqués, mais aucun des deux ne parlent plus de cette histoire…

    Et oui, on a les mêmes « suiveurs » ou « fans » du coté de CD pro, mais aussi Bioware et Bethesda, c’est devenu une mode. D’ailleurs des fois ces gens je me demandent s’ils prendraient aussi mal le fait qu’on insulte leur mère, j’avoue en douter, je devrais peut être tenter l’expérience

  5. Ninheve dit :

    C’est ça, un énorme potentiel, ce jeu c’est de belles promesses pour l’avenir, surtout qu’il ne faut pas oublier que c’est une première pour le studio.
    En revanche et ça devient une habitude, ce jeu se traine une belle bande de fans illuminés qui ne supportent pas la moindre remarques, allant même jusqu’à nier les bugs que certains peuvent avoir, pourtant problème reconnu par les dév, en plus on sait tous très bien (enfin quand on a un cerveau en tout cas) que c’est la roulette russe avec les configs et notamment avec les cartes graphiques. D’ailleurs il serait peut être temps de pointer du doigt Nvidia et AMD également, plutôt que de concentrer les critiques quasi exclusivement sur les dév (qui ont leurs responsabilités aussi soyons clairs), car c’est systématique, on a pas un jeu sorti dernièrement qui n’y a pas eu droit.

    Ah et sinon, quelqu’un sait ou trouver ces satanés chevreuil ?!

    pour les chevreuils il y en a un peu partout dans les bois…mais il y a surtout un spot dans la foret qui borde la carte à l’est à peu près à mi chemin entre neuhof et Uzitz dans la foret qui est même marquée comme zone de chasse du chevreuil…c’est une grande clairière mais sur la carte elle est boisée^^
    mais si c’est pour une quete…
    ben des peaux et de la viande j’en ai volé/emprunté quelques unes :p

  6. Toupilitou dit :

    pour les chevreuils il y en a un peu partout dans les bois…mais il y a surtout un spot à l’est qui est même marqué comme zone de chasse du chevreuil…
    mais si c’est pour une quete…
    ben des peaux et de la viande j’en ai volé/emprunté quelques unes :p

    … « Emprunté »

  7. flofrost dit :

    Merci pour l’info, j’ai décimé la population de cerf de la région, dès que je vois le nom Elaphe j’ai des crises de fureur. En plus c’est quoi ce nom à la con, c’est parce qu’on s’en sert pour la pâté Enaf ?

  8. Andariel dit :

    dès que je vois le nom Elaphe j’ai des crises de fureur. .En plus c’est quoi ce nom à la con, c’est parce qu’on s’en sert pour la pâté Enaf ?

    C’est parce que c’est un croisement entre un « élan » et une « giraphe ». Elan + griaphe = Elaphe, quoi… Comment ? Pas saisi ? Laisses tomber, tu ne peux pas comprendre les lois impénétrables de la FUUUUUUSION

    EDIT : Juste par précaution ; oui, l’orthographe charcuté de « girafe » est voulu. C’est même un peu la blague (pas drôle)…

  9. AbounI dit :

    les lois impénétrables de la FUUUUUUSION

    C’est pourtant un genre de fusion par … hm hm … pénétration, t’es sur que c’est pas à sa portée?


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