Murdered : Soul Suspect

Murdered : Soul Suspect est un jeu d’aventure développé par Airtight Games, édité par Square Enix, et sorti le 5 juin 2014 sur Steam. Sur le papier, c’est prometteur. Le jeu nous vante en effet une enquête sur notre propre mort, d’origine criminelle, ce qui n’est tout de même pas banal. Voilà donc une expérience de jeu qui nous promettait d’être originale, et qui se devait donc d’apporter quelque chose de nouveau. Est-ce le cas ?

 

Dans Murdered : Soul Suspect, nous incarnons un ancien délinquant devenu flic, qui se nomme Ronan O’Connor. Et le moins que l’on puisse dire est que cela commence bien mal pour lui, car les premières images que nous avons le loisir d’admirer sont en fait le film de sa vie, qui défilent successivement. Pourquoi ? Eh bien nous l’apprenons peu après, en voyant Ronan se faire défenestrer, et tomber lourdement au sol après quelques mètres de chute. Puis, un homme cagoulé surgit hors du bâtiment, l’air puissant, calme, et sûr de lui. Il fixe le corps grièvement blessé de Ronan, puis ouvre le feu froidement, vidant son chargeur dans la poitrine de l’inspecteur. Cette fois, pas de doutes, notre flic est bel et bien trépassé.

Nous voila même amené à suivre la fameuse lumière blanche, censée nous guider vers le paradis, au mieux, mais également vers Julia, sa bien-aimée épouse, décédée il y a peu, qui incarnait le centre de son monde, et qui avait réussi à le faire changer positivement de son vivant. Après une brève discussion avec la belle, quelque part entre la réalité et l’autre monde, Julia lui apprend qu’il ne peut encore définitivement la rejoindre pour enfin reposer avec elle ; il lui reste en effet quelque chose à terminer dans le monde des vivants, avant qu’il ne puisse traverser le « Pont ». Et nous voilà alors ramenés sur les lieux du crime sous une forme spectrale. Non loin de la, une fillette, elle aussi fantôme, nous apprendra que l’on peut posséder les vivants afin de voir ce qu’ils voient, ou de lire leurs pensées.

Elle nous informera également que les bâtiments de la ville de Salem ont été consacrés, et qu’il est impossible d’y rentrer sans qu’un vivant n’ouvre la porte pour y rentrer ou en sortir. Cela nous fait évidemment, par la même occasion, comprendre que l’exploration de ville sera limitée, si l’ont voit cela avec un œil un peu négatif. C’est bien lors de cette première petite enquête, qui consiste à relever les indices autour du corps sans vie de Ronan, que la première vraie déception se créée. En effet il s’agit ici de se rapprocher des indices, jusqu’à ce que la touche X apparaisse, et ainsi valider l’indice. Cette première collecte nous donne avec précision l’idée de ce que l’on devra faire durant tout le jeu, c’est à dire chercher des indices de visu, s’en approcher, et les valider. Une fois tous en notre possession, il suffira de valider l’enquête en cours en choisissant l’indice le plus pertinent et le plus fiable. Même si vous vous trompez dans le choix, l’indice se mettra simplement en gris et il s’agira alors d’en choisir un autre. Se planter n’aura donc aucune incidence.

Sur cette première scène de crime, nous aurons également à pénétrer dans l’esprit d’un policier afin de voir son calepin et ses précieuses informations, mais également d’espionner une conversation entre inspecteurs. A première vue, lire dans les pensées parait bien jouissif, mais durant le jeu, le mettre en pratique sur des piétons de Salem n’apporte rien. Les pensées sont souvent très banales, et on finit par ne plus le faire du tout, excepté si c’est primordial pour une enquête. Les pouvoirs spectraux de Ronan mènent donc à une autre déception. Une fois cette petite introduction dans le jeu passée, il nous faudra visiter la pièce où a eu lieu le combat entre Ronan et le tueur. Ce dernier est appelé le Crieur des morts ; un psychopathe ayant causé la mort de nombres de jeunes filles de Salem durant les semaines passées. Il signe ses meurtres avec le dessin d’une cloche à main.  Là aussi, ce premier « grand » niveau du jeu, appelé « Appartements », nous permettra de comprendre les mécaniques du jeu.

Et quelles sont elles ? Toujours la même chose en fait : eh voilà le défaut principal de ce jeu. On ne cesse, durant tout le long du soft, de chercher des collectibles, encore des collectibles, et toujours des collectibles ; les objets obligatoires (les indices d’enquête), mais également des objets optionnels, tels que des informations sur le tueur, des histoires morbides spécifiques à chaque lieux à visiter, des plaques d’informations sur la ville, sur le procès sorcières et même des lettres fantômes de sa compagne Julia dispersés un peu partout dans la ville et ses bâtiments. Mais, franchement, que foutent des mots de Julia dans l’asile par exemple ?  Ou dans le grenier d’une église ? C’est totalement incohérent, et  gâche bien l’envie de tout collectionner.

Un autre collectible s’avère lui encore plus énervant, puisqu’il faudra faire apparaître les dessins d’une jeune revenante sur des murs du jeu. Il n’y aura aucun indice pour savoir desquels il peut s’agir, et l’on sera donc bon pour longer tout les murs du jeu ! Et encore, si cela veut bien fonctionner, car il m’est arrivé d’être pile devant le bon mur, et rien à l’écran ne m’est apparu ; j’ai reculé d’un mètre, et voila que la fameuse touche X m’est apparue afin de révéler le dessin… Génial. Idem pour certains indices ; il m’est arrivé de passer à côté de l’un d’eux, puis rien. Je recule, toujours rien. Je fais quelques pas de côté, et voilà que la validation devient possible… Sympa.

Il y a donc d’un côté les collectibles signalés par une forte lumière dorée, que l’on peut  repérer à 500 mètres, et de l’autre des collectibles qui nécessitent de prendre un temps fou et une belle part de chance afin d’avoir une chance de les détecter. Les collectibles seront le fil conducteur du jeu, et on ne fait au final que cela. On fouille les décors, on va dans les coins, on traverse des murs pour peut-être débarquer dans une zone cachée… Mais toujours dans le but de ne passer à côté d’aucun objet (en tout cas, pour ceux qui souhaitent faire le jeu à fond). Ce qui aurait pu être un excellent jeu d’aventure, un vrai bon thriller, se transforme en un simple jeu de collecte d’objets.

C’est d’autant plus dommage que la ville de Salem, qui est à explorer pour ses collectibles encore une fois, mais également pour rejoindre les différents level du jeu, est bien réalisée et travaillée. Toujours de nuit,  Salem est lugubre, sombre, obscure .On peut croiser ici et là des spectres, des bâtiments fantômes d’autrefois, d’anciennes demeures, d’anciens gibets ; l’ambiance est bel et bien la. De plus, les différents niveaux du jeu étant des édifices et des lieux de Salem, nous aurons à visiter l’asile, l’église, le cimetière ou le musée de la ville. Ces derniers sont très très bien reproduits. Comme il s’agit de lieux anciens, nous n’aurons pas à faire à des niveaux trop droits, modernes ou  lisses ; le cimetière, par exemple, est sur plusieurs étages de pente, des zones ayant été ajoutées ou rallongées au fil du temps. L’église également n’est pas qu’un simple lieu de culte ;  la partie sacristie, ainsi que la partie logis et le grenier seront à explorer. Les différents niveaux du jeu font vraiment  tous  très authentiques. Esthétiquement, le jeu est donc bon.

Autre point fort du jeu : le héros,  Ronan, et Joy. La manière de communiquer de Ronan fait énormément penser à de nombreux rôles de Clint Eastwood. Ce dernier a souvent incarné des personnages d’antihéros. Et Ronan en est un, par son passé de délinquant, son aspect physique avec nombre de tatouages. Nous aurons souvent à faire à des scènes flashback lors de l’exploration de la ville. Nous verrons alors l’évolution du personnage par l’avant et l’après Julia. L’écriture du jeu est de qualité. Même si Joy fait un peu trop ado à mon goût, le duo avec Ronan fonctionne très bien. L’adolescente ayant un don de médium, elle parvient à communiquer avec les esprits, et se retrouve bien malgré elle embarquée dans cette histoire de meurtres avec le fameux Crieur des morts.

Si elle rechigne souvent à obéir aux demandes de Ronan, ce dernier essayera toujours de la convaincre, avec son ton et son air brut, à se faire aider dans ses investigations. L’autre personnage charismatique du jeu est le tueur en série, le Crieur des morts qui, par sa démarche, son incroyable puissance physique, et sa gestuelle de félin, représente un ennemi doublé d’un prédateur de premier choix. Cependant, un autre détail agaçant vient gâcher la joie de l’exploration des différents lieux : les démons. Eh oui, ici et là, des démons, toujours plusieurs, se déplacent selon un itinéraire précis, et le but sera de les attaquer par derrière et d’effectuer un petit QTE pour les éliminer.

Au cas où l’on se fait repérer, il faudra rapidement se cacher dans des âmes qui feront office de cachette. Mais, les démons les vérifiant toutes, il faudra rapidement aller d’une âme à une autre pour ne pas se faire détecter. Et dieu que c’est long ! Pendant un temps interminable, les démons iront vérifier les salles, les âmes. Ils viennent, repartent, puis reviennent à nouveau, jusqu’à ce qu’une corne de brume se mette à tonner, et de là ils reprendront leurs itinéraires de départ… Honnêtement, je pense que la présence de ces démons n’est là que pour ajouter un côté survival horror à l’ensemble. Mais vraiment, il n’avait pas besoin de cela. Vous le ressentirez sans doute également : la présence des démons est en trop là dedans.

A noter quelques phases d’infiltration, notamment dans le niveau du commissariat de police et l’asile, qui n’apportent pas grand chose au jeu. Il suffira d’interagir avec les seuls objets possibles. Elles n’ont donc pas grand intérêt, si ce n’est de nous distraire un peu de la quête des collectibles. Nous aurons également à faire à quelques phases où l’on aura la possibilité de posséder un chat. Cela n’apporte rien à l’œuvre, vu que le chemin à effectuer est très suggéré et tracé. Étant un chat, on aurait aimé explorer son petit monde, grimper et sauter un peu partout. Bah non. Les développeurs ont également prévu une touche spécialement pour miauler, ce qui ne servira strictement à rien du tout. On appuiera donc dessus 2 fois pour le fun et se faire plaisir, avant que cela ne finisse aux oubliettes.

Dans l’ensemble du jeu, il n’y aura que quatre pauvres petites quêtes annexes à résoudre, en ville cette fois. Là encore, il vous suffira de trouver les indices sur place, jusqu’à être en mesure de résoudre ladite quête. Honnêtement il y avait possibilité de faire bien plus de ce côté là. On croise régulièrement des PNJ avec qui l’on peut engager la conversation et qui, au final, ne servent  absolument à rien. De plus, les discussions sont sans intérêts. C’est vraiment dommage. Il y avait sans doute possibilité de nous sortir une bonne dizaine de quêtes et d’histoires de fantômes supplémentaires ! Et la question du « pourquoi guider  ces quatre PNJ à trouver le repos éternel, et pas les autres » restera donc sans réponse.

Cependant, il y a toujours ce petit quelque chose dans ce jeu qui me donne envie de continuer. Sans doute simplement pour son scénario, et mon coup de cœur pour le personnage principal et son côté Clint Eastwood. Les différentes cinématiques qui mettent en scène Ronan, Joy et le Crieur des Morts sont elles aussi très bien réalisées, et sont dignes d’un très bon thriller. Je dois avouer que j »ai eu envie de connaître le fin mot de l’histoire, ce qui m’a poussé à toujours continuer malgré les différentes lassitudes engendrées. Arriver au bout du jeu nécessite une bonne quinzaine d’heure si l’on souhaite obtenir tout les collectibles possibles, et moitié moins si l’on se contente de la quête principale.

 

En conclusion,  me voilà bien pour une fois bien embêtée. C’est pour moi un immense gâchis. Là où on aurait  pu avoir  un très bon jeu d’aventure, rempli de mystères et d’énigmes à résoudre, on se retrouve en réalité avec un jeu de collecte d’objets, dont certains extrêmement agaçants, car mal conçus, mal finis. Le challenge proposé, d’incarner un spectre faisant l’enquête de son propre meurtre, et pouvant posséder les vivants ainsi que les utiliser pour arriver à ses fins,  aurait pu se montrer jouissif, mais il en est rien. Lire dans les pensées des différents habitants de Salem s’avère vite barbant, et tout simplement sans intérêt. Évidemment, la réjouabilité est nulle. Vous ne ferez ce jeu et le challenge proposé qu’une seule fois, car il faudra tout de même courir après plus de 270 collectibles. Alors, pourquoi se lancer et vouloir en voir le bout ? Eh bien simplement car le scénario et la mise en scène sont bétons, qu’on souhaite savoir qui se cache derrière le Crieur des morts, et savoir si notre héros Eastwoodien parviendra à rejoindre sa bien-aimée. Un jeu que je cataloguerai donc, avec regret, dans la catégorie des grandes déceptions.

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A propos de l'auteur : Crazy-Alice

Rédactrice perdue dans le pays de la folie

11 Commentaires sur “Murdered : Soul Suspect”

  1. TheLoneCrow dit :

    Bon test !
    Ouai plutôt décevant comme aventure, certain objet sont barbant a trouver et quand on les trouve, des bugs nous empêche de les ramasser :-/ Zéro rejouabilité… Dommage quand même, comme dit l’histoire est plutôt sympa a suivre.

  2. flofrost dit :

    Une bonne âme m’en a gracieusement fait don, mais j’ai vraiment du mal à trouver la motivation de m’y mettre à celui ci.

  3. Toupilitou dit :

    Bin c’est juste dommage que le gameplay soit aussi enivrant qu’un plein fut de jus de pomme, parce que l’ambiance est là malgré tout. Il n’y aurait pas eu l’histoire, j’avoue que je n’aurais pas eu la foi de le terminer. Ce qui est sûr, c’est que je n’y retournerai pas ^^

  4. Marcheur dit :

    J’ai passé six heures dessus avant de m’endormir.
    Plus jamais ça les gars, un bon concept sabordé par un rythme et un gameplay complètement à la rue.

  5. flofrost dit :

    J’ai envie de dire que malheureusement, c’est dans la veine de tout ce que produit Square Enix depuis quelques années. Soit on a du fan service bas du plafond, soit un truc avec de bonnes idées mais plombé parce que fini à la pisse, et des fois ils prennent le pire des deux cas et te le mélange. Bref, avant le logo Square (et aussi celui d’Enix) était un gage de qualité, maintenant ça aurait tendance à me faire fuir. C’est comme en cuisine, tu peux prendre les meilleurs ingrédients, parfois le mélange sera quand même complètement dégueulasse, c’est exactement ce qui c’est produit avec cette fusion de Square et Enix.

  6. Toupilitou dit :

    Parmi la masse, y’a bien deux jeux que j’ai trouvé bons qu’ils ont édité : le dernier Thief et Deus Ex HR (la Director’s Cut par contre). Pour le reste, bin c’est plutôt des déceptions en effet.

    Pour la route, je suis quand même franchement surpris que vous n’ayez pas encore saisi la perche de Life Is Strange ^^

  7. Yu~Ki dit :

    Superbe test. La direction artistique ne semble pourtant pas dégueulasse (Cinématiques dans le contexte). C’est vraiment dommage car ça semblait si alléchant à l’écran. Bon, après tout, je dois avouer qu’ il m’a donné envie de l’essayer au vu de cette contenance scénaristique de qualité et digne des meilleurs thrillers jamais réalisés et leur petit lot de twists. J’ai vu un ami y jouer et je suis bien d’accord avec la répétition à outrance et les pnj inutiles.

    Square Enix à semblé changer de tactique commerciale ces dernières années pour survivre, la ou les vieux studios se démantèlent peu à peu avant de sombrer dans les abysses de la reconversion ou de la faillite. Il est vrai que l’essence des FF n’est plus la même mais restons tout de même optimiste car il est impossible de contenter tout les vieux joueurs. Il ne faut pas oublier qu’ ils ne sont qu’éditeurs et non développeurs pour ce jeu. Cela change absolument tout. Il y aura forcément d’autres studios comme DONTNOD (life is strange/remember me) prêt à créer d’autres perles d’immersion scénaristique à la DA aussi soignée que le gameplay.

    A tester pour le plaisir d’incarner des antihéros atypiques en gommant ces petits défauts dérangeants de nos orbites.

  8. Toupilitou dit :

    Coucou Yu~Ki !

    Pour pas que t’étonnes de la réaction de certains ici présents, je t’invite à lire un certain débat : https://loutrage.fr/otters-dial-1-life-is-strange/ 😀

  9. flofrost dit :

    « Il y aura forcément d’autres studios comme DONTNOD (life is strange/remember me) prêt à créer d’autres perles d’immersion scénaristique à la DA aussi soignée que le gameplay. »
    Au bucher ! Bordel de merde, les allumettes sont trempées, je suis sûr que la loutre a pissé dessus ! Je croyais qu’on devait lui installer une litière ?! Vous faites chier, on aurait pu se faire un bon gros barbecue…

    « Parmi la masse, y’a bien deux jeux que j’ai trouvé bons qu’ils ont édité : le dernier Thief et Deus Ex HR (la Director’s Cut par contre). Pour le reste, bin c’est plutôt des déceptions en effet. »
    Des licences qui existaient avant, donc SE a peu de mérite, au contraire, personnellement j’ai même trouvé qu’au passage chez eux ces deux licences y avaient perdu. Soyons bien d’accord, ce sont de bons jeux, mais les précédents eux étaient de grands jeux.
    Et Yu~Ki, ce ne sont pas eux qui ont fait le jeu, mais ce sont eux qui ont validé le tout, voir peut être même qu’ils ont imposés certains trucs, ce serai pas la première fois. En fait dans le monde impitoyable du JV, l’éditeur a bien souvent plus de poids qu’on peut le croire, ce qui en même temps est logique, c’est ton pognon, on peut comprendre que tu ais envie de contrôler ce qu’on en fait ^^

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