Severed

Dans ce troisième épisode de la trilogie des jeux Drinkbox Studios, le suspens est à son comble. Marcheur sera-t-il capable de réitérer l’exploit de n’écrire que mille trois cent mots sur ce troisième titre ? Se montrera t-il enfin sans reproches sur ce dernier jeu ? Saura t-il arrêter les hors sujets dans ses textes (… jamais !) ? Et enfin, car c’est finalement cela qui nous intéresse, est-ce que ce dernier jeu en date du studio est le titre le plus réussi et le plus frais du studio ? Ne zappez pas la suite après le mot dindon…
…dindon.

 

Un brutal changement de ton

Après deux univers plutôt rigolo et décomplexé, Severed est un virage à quatre-vingt dix degrés des plus surprenants. Si l’on retrouve les couleurs vives et la direction artistique si particulière des jeux Drinkbox Studios, difficile de ne pas voir les différences majeures entre un Guacamelee et un Severed. Visuellement plus glauque et plus sauvage que leur dernier titre en date, le jeu des canadiens s’avère des plus soignés dans son esthétique, et évoque une influence majeure : Zeno Clash. Ce fameux jeu de versus fighting étrange, mêlé à de l’aventure baignant dans une direction artistique somptueuse, et un univers tout aussi fort qu’assumée, est le principal repère que l’on peut retrouver dans le paysage vidéo-ludique pour faire un comparatif avec le visuel de Severed.

Cette direction artistique plus étrange, plus glauque et forcément malsaine, s’accompagne d’un sound design plus léché, lui aussi plus remarquable et plus effrayant que par le passé ; un changement et un accent mis sur la réalisation bienvenu, accompagné de l’habituelle propreté technique de la version Vita qui s’avère simplement somptueuse. Drinkbox Studios accouche d’une œuvre au visuel fort, à la musique, aux bruitages, et aux doublages dans le même ton, ainsi qu’à une histoire simple qui pose des questions d’un ordre bien plus sérieux, sans s’avérer une seule seconde prétentieuse.

Ces multiples réussites, s’accompagnent d’un casting de protagonistes plus marquants, mieux écrits, et bien plus travaillés que par le passé. Chaque personnage a un design et une personnalité forte, en accord avec le monde dans lequel le joueur et l’héroïne qu’il incarne évolue. Cette réussite n’a de cesse de s’additionner encore à une mise en scène léchée et non intrusive, qui jamais ne vient hacher le rythme d’une aventure aux allures de voyages initiatiques sanglants, dans lequel le joueur se surprendra à tenir plus que tout au personnage qu’il contrôle du bout des doigts.

 

Un sans-faute sur le plan du gameplay

Bon élève, Drinkbox a pris conscience des soucis de son précédent titre, et décide pour l’occasion de changer de crèmerie en faisant de son dernier jeu un dungeon crawler au fonctionnement global classique, mais aux gimmicks franchement couillus. Si vous n’avez jamais joué à Fruit Ninja sur téléphone portable, sachez que Severed en reprend le principal intérêt : trancher des choses avec ses doigts. Le tactile est au cœur de l’expérience du jeu ; trancher, découper, et taillader dans le titre s’avère aussi jouissif que le système intuitif, alors que le mélange était clairement inattendu. L’immersion est excellente et chaque combat s’accompagne d’un sentiment d’urgence mêlé à une implication physique réelle du joueur. Il faut, pour ainsi dire, trancher dans le vif lorsque l’occasion se présente.

Mais pour cela, il va falloir étudier les ennemis, au nombre d’une demi douzaine évoluant au fil de la progression. On voit finalement assez vite le bout du bestiaire. Si cela peut s’apparenter à un défaut, sachez que lorsqu’ils seront mélangés et que vous aurez à affronter simultanément quatre adversaires de quatre genres différents, vous ne verrez pas le manque de variété des créatures. D’autant que le jeu apportera des nuances, rendant le système de combat franchement exigeant vers le final, en vous apportant pourtant seulement trois pouvoirs dont il faudra user avec intelligence afin de se sortir des mauvais pas.

Tout ce système est soutenu par un efficace triplé  d’arbres de compétences améliorant les capacités de votre personnage. Vous devrez, pour gagner en puissance, trouver des objets améliorant votre vie ou votre magie, mais aussi et ce bien plus souvent, des morceaux d’adversaires, tels des membres, tentacules, yeux, cerveaux et autre viscères. Ces objets, aussi répugnants puissent t-ils être, seront les seuls aptes à améliorer votre personnage et à lui donner la force de vaincre des adversaires toujours plus féroces. Mention spéciale aux trois boss du jeu, très travaillés.

Les déplacements fonctionnent comme dans un dungeon crawler classique, même si l’on doit faire une croix sur une touche permettant de reculer; un oubli qui ne fâche pas tant que cela, mais reste tout de même notable. Si se mouvoir dans le titre est assez déconcertant au départ, cela fini par vite devenir agréable grâce à une vitesse de déplacement assez importante et à une grande variété d’environnements.

 

Une construction bien plus réussie que par le passé…

… et une réelle variété dans la manière d’aborder les niveaux. Si les énigmes intégrées au jeu sont aisées, elles ne le sont que pour fluidifier la progression dans un titre d’un genre qui use et abuse des allers-retours. Ici, cela est très largement effacé par un travail sur la connexion des zones entre elles. En effet, à mesure que vous progresserez, les raccourcis se multiplieront, et avec eux, la cohérence de l’univers. Un progrès qui fait plaisir à voir lorsqu’on a connu les anciens titres du studio. Progrès qui s’accompagnent des qualités des canadiens à varier leurs formules, avec de l’exploration en pagaille et de nombreux secrets à dénicher ; une dimension encore plus soulignée par des affrontements peu nombreux au départ, et qui deviennent plus fréquents sur un final qui pousse à bout.

Tous ces progrès amènent à une durée de vie très maîtrisée d’environ une dizaine d’heures pour le cent pour cent. C’est une bonne chose, car le jeu a fait une croix sur la profusion d’éléments que pouvait proposer leur dernier titre, et le jeu se conclue là où il faut, au moment où il faut. Et c’est une grande preuve de maturité que de savoir où et quand votre formule arrive à son paroxysme.

 

Quelques regrets ?

Oui. Mais des choses personnelles. Le jeu ne permet que peu de rejouabilité, car il est possible de débloquer toutes les compétences avant le final et de tout faire à la première partie. Toujours sur le sujet, j’aurais surement aimé un jeu proposant plus de personnalisation du personnage mais c’est un parti-pris pour fluidifier un jeu qui mise sur son accessibilité et son côté casual gaming, ce qui n’a rien de péjoratif compte tenu de la qualité de l’œuvre.

Non, le plus gros problème, c’est que Severed est certainement l’un des tout meilleurs jeux de la Vita, et que c’est toujours bien trop court pour me satisfaire pleinement. Je suis tellement à la recherche d’expériences fraîches, qu’un titre comme celui-ci est un cadeau des cieux qui me redonne juste assez d’oxygène pour survivre à un désert quasi constant peuplé de jeux sans intérêts. Severed, c’est tellement bien que quand tu l’as fini, tu te sens frustré de l’avoir fini, coupable de ne pas avoir arrêté de jouer avant la fin, supprimer la sauvegarde, et recommencer. Mais est-ce vraiment un regret ?

 

Félicitation Drinkbox Studios ! Ce dernier titre en soutien à la Vita est une perle rare qui convient à tous de tester. Naturellement pensé pour le tactile, le jeu connaît déjà un portage sur tablette et portable pour être accessible à tous, et sera disponible plus tard sur 3DS et Wii U, plateformes qui sauront offrir le mieux à ce jeu d’exception. Si vous êtes possesseur d’une Vita, d’un portable puissant ou d’une tablette de même calibre, Severed est un jeu peu coûteux, extrêmement bon, qui ne demande qu’à être parcouru. Et, si vous êtes fan de Nintendo, guettez avec attention un futur portage qui se savourera à pleine dents. Quant à moi, j’ai tenu mon pari : pas beaucoup plus de mille trois cent mots. Vous avez vu docteur, je me soigne !

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A propos de l'auteur : Marcheur

Enfant attardé de Kreia et d’Alfred de Musset. Pense que tout est narration, et répète sans cesse qu’il donne tout en dansant comme un ouf

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