Super Lucky’s Tale

Super Lucky's Tale

Le voilà ! Le AA de fin d’année de Microsoft, le jeu prodigue s’inscrivant dans des intentions similaires à un Recore : proposer autre chose aux joueurs de la marque du « X  » vert qu’un énième Forza ou Halo. Il faut bien dire que l’annonce surprise de ce titre à l’E3 était entourée de doute. Était-ce bien raisonnable de demander à un studio n’ayant fait de remarquable qu’un jeu VR de plateforme honnête de faire la même chose sans VR ? Désormais, Lucky le renard se retrouve sans gimmick pour justifier son classicisme, et nous apparaît donc seul comme un grand à tarif réduit pour se trouver son public sur Xbox One le jour du lancement de la Xbox One X. Le courageux renard parviendra-t-il à briller pour sa deuxième incursion dans le monde vidéo-ludique ? Rien est moins sûr.

 

Super Lucky’s Tale est dès le départ un peu étrange. L’ADN VR est encore présent dans le level design, et avec la gestion d’une caméra fixe ne pouvant se diriger que vers trois angles, pas de quoi vraiment aider à changer de point de vue. Ainsi, on se fait à l’idée de ne pas toucher à la caméra. Mais, on doit aussi assez vite se faire à l’idée de ne toucher qu’à trois touches, car c’est là l’horizon de Super Lucky’s Tale : A pour sauter, X pour donner un attaquer, et RT pour creuser sous le sol. C’est peu. C’est vraiment très peu, et le jeu ne fait jamais rien de plus pour s’enrichir, parce qu’il se destine à un public jeune et brasse le plus largement possible.

Mais brasser large n’est pas un défaut, et l’accessibilité non plus. L’ennui, c’est que les contrôles, la physique, et la maniabilité globale ne sont pas optimums. On pestera bien vite sur le côté glissant des déplacements, les multiples problèmes de collision lorsque l’on se prend des dégâts dans les airs et que notre personnage se retrouve à littéralement marcher sur ce qui lui a fait du mal. On croit aussi rêver lorsqu’un ennemi nous saute dessus, nous causant des dommages, mais qui tient fermement sur la tête de notre protagoniste lorsqu’on vient à se déplacer, le challenge étant de le déloger avant que la frame d’invincibilité de notre héros ne s’éteigne après le dégât subi. Le genre de détail plus que fâcheux qui s’explique pourtant très facilement : Unity.

Super Lucky’s Tale est un jeu en 3D faisant usage de Unity, et à l’instar d’un Recore, la physique est extrêmement chaotique et plombe pas mal la plateforme. Là où Recore savait compenser cette faiblesse par une maîtrise des mécaniques de jeux et une grande réactivité, Lucky se casse les dents sur ses contrôles, qui se conjuguent avec les défauts du moteur. On pourrait cela dit penser que ce défaut pourrait être compensé par des plateformes travaillées et précises… Là encore, ça coince. Si le level design est particulièrement varié et parfois assez bien bâti, quelques placements hasardeux de plateforme gonflent au regard de la physique et des problèmes de collision qui auront tôt fait de faire tomber votre personnage.

Et il faut bien comprendre que dans Super Lucky’s Tale, si on tombe, on meurt. C’est d’ailleurs la seule menace potentielle, car les ennemis sont faciles à vaincre et les différentes épreuves ne vous mettront pas à genou. On se retrouve donc à lutter contre les problèmes du moteur plus que contre le challenge en lui même, d’autant que si un système de vie limité pourrait amener une composante de stress pas inintéressante, il est si aisé d’en récupérer qu’on ne s’en inquiète plus passée l’heure de jeu et la vingtaine cumulée.

Alors que je suis en train de pratiquer une clef de bras à Lucky, et que vous grimaciez déjà de plaisir ou de dégoût à l’idée d’entendre l’os céder sous la pression, laissez-moi confirmer le supplice en déclarant que les énigmes sensées renouveler la proposition m’ont gentiment pris pour un con. Lucky porte désormais une attelle alors que je vous dis qu’il m’a fallu environ zéro seconde pour résoudre les six premières énigmes du jeu, et pas beaucoup plus pour le reste. Je parlais de vie limitée, mais il faut aussi savoir qu’on peut les farmer à l’envie à chaque fois que l’on revient dans le hub de chaque monde, car les pièces qui, une fois cumulées, permettent de récupérer des vies réapparaissent à chaque fois. On a tôt fait de détruire le peu de challenge que le titre aurait pu offrir, et c’est à ce moment qu’en plus d’un joli cassage de bras, Lucky se ramasse deux bonnes grosses torgnoles dans sa tête de con toujours souriant d’ailleurs, bien que désormais édenté.

Pour ne rien arranger, la structure de Super Lucky’s Tale est prévisible. Pour débloquer des nouveaux mondes, il vous faudra collecter des trèfles que vous trouverez dans des instances où il est possible d’en gagner quatre, mais aussi en résolvant des énigmes. Ainsi, en une instance, vous trouverez le trèfle obligatoire de fin de niveau, mais aussi deux trèfles cachés, et un dernier trèfle pouvant se récupérer en récoltant 300 pièces dans le niveau. La ligne droite est très aisée, la recherche complète est déjà un poil plus ludique avec quelques idées de level design qui font leur petit effet, notamment lorsqu’on passe à de la plateforme 3D à la 2D, et que Super Lucky’s Tale joue alors sur l’arrière-plan pour surprendre. Pas mal Lucky, tu vois quand tu veux ?

C’est globalement là où Super Lucky’s Tale brille le plus, en voulant offrir beaucoup de choses à faire parfois très différentes aux joueurs. C’est con, mais récupérer des œufs pour les rendre à leur mère-poule, frapper des poules pour les faire voler dans leur enclos, résoudre des micro-casses-tête environnementaux mêlés à de la plateforme, avoir une phase digne d’un jeu mobile de running, les combats de boss, les arènes où il faut bien gérer les rebonds… Sans savoir vraiment maîtriser quoi que ce soit, Playful sait faire varier son gameplay et n’ennuie pas, malgré un challenge inexistant. Un certain exploit en soit, il faut reconnaître.

Puis, il faut aussi dire que si on ne vomit pas à la vue de couleurs chatoyantes et d’un univers so cute, on peut saluer l’esthétique assez recherchée et personnelle du titre, qui ira parfois ravir les mirettes, sans cependant jamais vraiment foutre la claque. Toutefois, le design des personnages est soigné, excepté celui du héros. Les environnements sont assez vastes et variés, et il y a pas mal de vie qui se dégage d’un monde envahi de créatures nombreuses et souvent bien différenciées. Bref, c’est plutôt joli sur le plan visuel.

Les musiques, par contre, sont insupportablement répétitives, et on souhaitera bien vite couper le son, car les bruitages n’ont rien de marquants, et les doublages sont simplement absents. Donc, pour une fois, j’ai fait mon Toupilitou, et après avoir entendu la boucle d’une musique, je baissais le son jusqu’à la suivante. C’était aussi pour mieux apprécier des dialogues assez rigolos et bien écrits, mis en scène par des personnages aux animations répétitives certes, mais assez abouties et caractérisant bien les personnalités de chacun. Mention spéciale à Tess et son tic langagier qui m’a décroché un rire con, mais assez sincère.

Enfin, le gamefeel, s’il est globalement assez plat, n’est pas non plus totalement à côté de la plaque quand on creuse pour aller gratter quelques pièces sous terre pour en sortir dans un bond vif et souple, ce qui tranche avec la lourdeur globale des contrôles. On profitera donc de ce petit plaisir la petite dizaine d’heures que prendra le jeu pour sa complétion totale, pas alourdi par un scénario qui aurait été de toute façon superflu ; la simplicité de l’ensemble donne un rythme agréable au gameplay, même un certain côté addictif. Allez, redresses-toi Lucky, je vais te raccompagner chez toi.

 

Gardes ton sourire niais, Lucky ; t’as peut-être perdu l’usage d’un membre et pris quelques coups, mais tu trouveras bien quelques âmes charitables ou jeunes gens pour t’apprécier. Néanmoins, il faut garder en tête que Super Lucky’s Tale se traîne des casseroles difficiles à assumer, car elles concernent tout un gameplay hautement perfectible du titre, ainsi que des défauts techniques qui ne pourront d’ailleurs, pour la plupart, même pas être corrigés. En l’état, Super Lucky’s Tale est un jeu de plateforme honnête à prix réduit, d’une durée suffisante pour son tarif affiché, mais il ne délivrera que son véritable potentiel qu’avec un patch rendant possible l’usage d’un casque de réalité virtuelle, qui semble convenir à merveille à la caméra et au gameplay du titre. Allez, sans rancune, Lucky, mais je ne pense pas qu’on te reverra un jour ; même si tu te vendais correctement, je ne vois guère d’avenir pour toi qu’être un jeu pour le jeune public. Cela n’est pas un défaut de s’adresser aux enfants en captant ce qui faisait la magie des jeux de plateformes des années PS1 / PS2, mais le faire sans idées ni personnalité, c’est risquer de n’être qu’un jeu à la dent creuse… ce qu’est finalement ce Super Lucky’s Tale.

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A propos de l'auteur : Marcheur

Enfant attardé de Kreia et d’Alfred de Musset. Pense que tout est narration, et répète sans cesse qu’il donne tout en dansant comme un ouf

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