Of Orcs And Men

Of Orcs And Men

Cyanide est devenu populaire auprès du public grâce à son adaptation maîtrisée du jeu de plateau Blood Bowl. Il est aussi de notoriété que ce studio enchaîne les projets sans prendre vraiment soin de ses bébés ; Loki ayant subi un traitement restant dans les mémoires. Dans sa lancée de production de jeux de rôle occidentaux, Cyanide développa le perfectible mais assez brillant Trône de Fer, bien que son véritable objectif était d’imposer une nouvelle licence auprès du public : Of Orcs and Men. Pourtant, sur le boîtier, il y a mention de Spiders, studio qui, en 2012, n’était connu que pour son mini-jeu Faery : Legends of Avalon. C’est normal ; ils ont exécuté le travail de réalisation du titre en possédant le script du jeu fourni par Cyanide, qui était trop occupé sur GOT, ou une autre raison qui m’échappe. Mélangeant la patte Cyanide et celle de Spiders, quel est le résultat de cette production, disons-le, bâtarde ?

 

L’histoire ayant été écrite par Cyanide, il faut donc rendre à Caesar ce qui lui appartient : ils se sont montrés excellents. Le contexte est pourtant assez simple : une guerre ravage le monde, et les orcs subissent un génocide perpétré par les Humains qui ont bâti un mur entre leur civilisation et les terres des peaux vertes. Les Elfes et les Nains sont neutres dans ce conflit, et ne savent qui choisir entre les orcs et les hommes.

La différence entre un scénario classique et celui de Of Orcs And Men, c’est que le joueur incarnera un orc, Arkaïl, et un gobelin, Styx. L’orc étant un gros baraqué, tandis que le gobelin est une petite fouine, l’un penchant naturellement sur les coups de tatane dans la tronche, et l’autre sur les couteaux dans la glotte. Ce duo se verra attribuer une mission de haute importance pour en finir avec la guerre. Évidemment il y aura des rebondissements dans ce scénario porté par cette équipe classique… mais hilarante. Le jeu est en effet bien écrit, bien doublé, bien narré, ainsi que sobrement et classieusement mis en scène. Même si pour le coup, nous devons la mise à scène à Spiders, qui a respecté le travail de Cyanide tout en essayant d’habiller le jeu du mieux qu’ils ont pu avec peu d’argent ; en France, on a des idées, mais on manque cruellement de fric. Mais, je salue Focus qui a malgré tout pris le risque de sortir le titre en boîte, sur 360, PS3 et PC.

Commençons par ce qui saute aux yeux : techniquement le jeu fait pâle figure face à la concurrence, les animations sont tout juste moyennes, les environnements sont en couloirs et donc étriqués, voire étouffants. Ils sont d’ailleurs globalement assez pauvres, même si visuellement, le Silk Engine – moteur maison de Spiders – offre un rendu correct tout en proposant des couleurs vives et jolies. Les musiques s’avèrent quant à elles, parfaitement réussies, car composées par le génialissime Olivier Derivière. Les doublages ne sont pas en restes comme dit précédemment ; la plupart des protagonistes sont justement doublés.

Mais si la réalisation aurait pu s’en tirer avec quelques honneurs, le côté statique et mort des lieux de vie, ainsi que l’IA, tirent l’ensemble vers le bas. Peu d’argent a été investi dans la réalisation graphique du jeu, et cela se sent. Tout semble avoir été fait à l’économie ; les environnements qui ne se renouvellent que trop rarement en témoignent. Parlons alors du plus gros défaut du titre : le level design. Plat, plat plat plat et plat. Pas de raccourcis, pas d’exploitation – ou peu – des capacités et de la corpulence des protagonistes, pas d’exploration, rien. C’est le vide le plus plat que j’ai vu depuis longtemps, et c’est d’un triste. Les niveaux sont un enchaînement de couloirs, avant quelques rares arènes qui accueillent des adversaires à terrasser, à l’aide d’un système de combat classique qui tire malgré tout son épingle du jeu.

Je le pense très fort depuis que j’ai fini Star Wars : KOTOR premier du nom : pour un studio qui manque de budget, le système de tour par tour dynamique des premiers jeux 3D de Bioware reste une alternative viable. Et Of Orcs And Men, à l’instar d’un Trône de Fer, s’inspire de ce système. Ainsi, les combats amènent une file d’ordres à donner à nos deux uniques protagonistes, qui s’exécuteront alors les uns après les autres. Ce système est rendu viable grâce à une touche permettant de donner des ordres tout en ralentissant le temps, avec une roue de choix rappelant beaucoup Dragon Age Origins, surtout pour le meilleur et beaucoup moins pour le pire en ce qui concerne la version console du jeu. En revanche, niveau ergonomie, on repassera sur PC.

Arkaïl dispose de deux postures de combats, une offensive (taper, c’est bien) et une défensive (taper, c’est bien, mais se faire taper, non). Chaque posture amène diverses compétences, et permet de gérer une barre de rage, qui, une fois pleine, fait entrer notre héros dans un état de transe guerrière. Il frappe alors tout ce qui lui passe sous la main, Styx compris, le laissant exsangue après la période d’effet de ce “maléfice”. Pour gérer cette barre, pensez à libérer la rage d’Arkaïl au moment opportun en modulant son degré de vénérance (j’ai pas pu résister), en passant du mode offensif à défensif quand vous pensez que cela est nécessaire.

Styx quant à lui, en bon roublard, pourra attaquer à distance avec ses petits couteaux de lancer, via des compétences associées, et il pourra aussi attaquer au corps à corps ; ce corps à corps est surtout composé de beaucoup d’afflictions permettant de fragiliser les défenses, l’attaque, ou d’infliger des dégâts sur la durée à un adversaire. Il pourra en outre, lors des phases d’exploration, se rendre invisible afin de trancher quelques gorges pour simplifier les affrontements. Attention, en mode invisible, Arkaïl demeure immobile, et lorsque vous aurez atteint une certaine distance entre lui et Styx, celui-ci s’écrira “je peux pas le laisser tout seul”. C’est frustrant, car on aimerait bien tout nettoyer d’une traite au lieu de chaque fois amener Arkaïl à Styx dans une nouvelle zone ; cela donne un côté encore plus dirigiste et rébarbatif au jeu.

Je ne saurai que trop vous conseiller de jouer ces deux personnages en complémentarité, et de ne pas juste compter sur la brutalité d’Arkaïl ou la roublardise de Styx. Parfois, il faut savoir jouer contre la nature de ses personnages quand cela s’avère nécessaire, car les combats sont loin d’être faciles. Vous pouvez spécialiser les deux personnages en améliorant leurs compétences au fur et à mesure des niveaux qu’ils passeront. À noter qu’il est possible de les équiper de matériels différents, que vous trouverez lors des couloirs… lors des missions, pardonnez-moi.

En plus de ces différentes options, vos personnages ont un troisième arbre de compétence “spécial”, qui comporte des compétences de soutien, ainsi que des capacités ultimes qu’ils débloqueront au bout d’un certain temps. Le système de combat est donc finalement bon, même si on aurait aimé que le jeu se tourne vers autre chose que de la baston et de la parlotte. Un système de choix de dialogue existe, mais il est très pauvre, et vos choix seront finalement limités à poser des questions, ou accomplir une des trop rares quêtes secondaires.

Pour la durée du titre, notez qu’il vous faudra environ 15 heures pour en voir le bout. Ce n’est pas beaucoup pour un A-RPG, d’autant plus que le jeu n’est pas si rejouable que ça, mais il faut noter que l’ensemble s’avère paraître complet une fois que vous aurez accompli l’aventure. Il est tout de même certain qu’il y aura une suite, et je la souhaite. Parce que oui : le jeu est bon. Pas très bon, mais il veut bien faire les choses, notamment raconter son histoire. Et ça, il y arrive brillamment.

Vous aimez les J-RPG au plus profond de vous même mais ne parvenez pas à faire avec ses clichés énervants ? Et bien assumez votre passion secrète avec un habillage occidental, parce qu’Of Orcs and Men n’est pas beaucoup plus qu’un J-RPG à la française. Sûrement bancal dans son gameplay, médiocre dans sa conception des couloirs… euh, niveaux, et aussi très frustrant par ses multiples aspects limités. Il n’en reste pas moins que son scénario est le plus réussi depuis pas mal de temps avec Le Trône de Fer.

 

Avec une mise en scène efficace, des dialogues brillants, une narration du meilleur goût, ainsi qu’une trame globale intelligente et mature, ce jeu peut se targuer d’avoir une identité réelle, ce qui, pour un titre de commande, reste un exploit intéressant. Si vous êtes prêt à passer au delà de ses nombreux problèmes, et que la verdure ne vous rebute pas, eh bien je vous recommande chaudement Of Orcs And Men. Tout en précisant que la concurrence à gros budget peut avoir honte, il enterre purement et simplement l’écriture de nombreux blockbusters.

Tags

A propos de l'auteur : Marcheur

Enfant attardé de Kreia et d’Alfred de Musset. Pense que tout est narration, et répète sans cesse qu’il donne tout en dansant comme un ouf

Un commentaire sur “Of Orcs And Men”

  1. Etorra dit :

    Bref vivement que les développeurs français aient de l’argent :p


Connectez-vous pour laisser un commentaire

Groupe Steam

Derniers commentaires

Aller à la barre d’outils
>