Error System : Sacred 3

J’avais déjà écrit un article sur Sacred 3. Une critique que je voulais originale. Une fois finie, je la faisais lire à Toupilitou, qui vint sur son cheval poney… son tout petit poney blanc. Et, après avoir galéré bien deux minutes le temps d’enfin descendre de son fidèle destrier, il s’écria en ces termes : « jeune padawan, saches que la vulgarité ne sert pas de ponctuation ; c’est lourd à lire ton article« . Il fit mine de repartir une fois que je l’eus aidé à monter sur son poney nain, mais, au passage, il me confia à l’oreille : « Si tu veux tailler un jeu, fais-en un coup de gueule« . Sur ces sages paroles, la loutre, la clope au bec, s’en vint alors vers de nouvelles aventures. Et pour ma pomme, je réfléchissais avec délectation aux milles et une souffrances que j’allais faire subir à Sacred 3. 

 

Des erreurs, on en fait tous. Parfois avec des bonnes intentions, le plus souvent d’ailleurs. Comme dirait l’autre « l’enfer est pavé de bonnes intentions« . C’était surement le cas des développeurs du jeu, Keen Games. Sauf que la meilleure façon d’expliquer Sacred 3 serait de le décrire comme un projet bâti sur un ancien cimetière indien, dont les occupants sont tous morts sur le sentier de la guerre, et que ce même cimetière se situe au milieu d’une ancienne zone de test de bombes nucléaires. Sinon, je ne vois pas quel mauvais esprit aurait pu être suffisamment cruel pour infliger une telle chose à la série de hack’n slash si chère à mon cœur. Sacred 3 ne se contente pas de la tuer, non. Il préfère jouer avec le cadavre de la série afin de le travestir en une diabolique marionnette macabre de beat’em up médiocre, n’ayant pour lui que le visuel et son dynamisme. Le reste est à bannir dans un nouveau concept, l’enfer de l’enfer, parce que Sacred 3 dépasse le cadre habituel du concept de « trahison ».

Arcania, c’était un jeu d’action-aventure descendant d’une lignée de jeu de rôle hardcore. On est plus ou moins devant le même cas, sauf que non. Arcania, on a beau dire ce qu’on en veut, il a fait des choix – couillus – afin de soutenir une nouvelle vision narrative, continuer à proposer une certaine liberté de mouvement, tout en s’appuyant sur une narration beaucoup plus soutenue. Le tout enrobé d’un contexte et d’un scénario intéressant, qui considère les humains comme n’étant pas tout à fait libres de leur destinée. Bref, il y avait des choix cohérents et intéressants qui font que, Arcania, sorti de la saga dans laquelle il fait partie, fonctionnait suffisamment bien pour qu’on le considère comme un jeu correct.

Sacred 3 a un autre problème, car même pris indépendamment de la série, il ne réussit rien de bien. Son parti-pris est d’écourter les sessions de jeux afin de coller aux séances de jeu d’un joueur mobile… tout en ne sortant que sur console de salon et PC. Sa présence sur des consoles comme la 3DS ou la PS Vita m’aurait fait dire « un jeu adapté à son support« , sauf que là, rien. Rien du tout, le vide intersidéral, l’absence absolue de but créatif ; faire un jeu portable sur support sédentarisé. Et de plus, même la personnalisation des héros est pensée dans l’optique du jeu mobile avec très peu d’options et très peu de choix. On est dans l’optique des compétences que l’on fait évoluer, et non changer à notre envie. Quand choix il y a, cela n’est jamais qu’en binaire ; la personnalisation est donc vouée à se jouer sur des détails, ou sur le choix des compétences que vous équiperez avant la mission.

Après, ce choix amène aussi à un autre constat ; à simplifier complètement sa structure, à détruire les repères les plus évidents de la série (… le monde ouvert et la gestion de l’équipement ont tout bonnement disparu), les quêtes secondaires sont transformées en destruction de vagues successives de monstres tous plus débiles les uns que les autres, alors qu’elles s’avéraient parfois très travaillées pour un hack’n slash dans Sacred 2. Ici, rien de tout ça. Tout est mal écrit, débile, stupide, avec des dialogues à base de blagues carambar pour accompagner le joueur dans son supplice. C’est certes assumé, mais c’est lourd ; l’humour ne fonctionne qu’occasionnellement et on vous bombarde de mauvaises blagues. Imaginez juste ce que c’est que de finir le jeu pour s’assurer qu’il est mauvais du début à la fin…

Peut-on vraiment parler en bien d’un jeu qui propose, en plus de ses multiples tares, des niveaux linéaires et peu travaillés dans leur level design constamment ennuyeux à parcourir, rythmés par des arènes minuscules, à l’occasion de pièges ridicules et de boss parfois plus intéressants que la moyenne ? C’est la routine qui s’installe dans la triste expérience que vous aurez avec ce jeu, qui oublie jusqu’à la notion de fun une fois qu’il balancera pour la cinquantième fois la même arène, dont la résolution se fera uniquement par l’effort surhumain du joueur à accepter une nouvelle fois de jouer comme un bourrin.

Au final, on ne ressort pas défoulé d’une session de jeu de Sacred 3. On en ressort déprimé et assez énervé. Énervé de constater que le jeu est une perte sèche de temps, que l’imagination de ses ambitions de départ fut une perte de temps, et son développement une perte de moyens et de talents graphiques. Sans doute que sur d’autres supports, Sacred 3 aurait trouvé un public, mais là, arborant fièrement une moyenne de satisfaction de 20% par les joueurs de Steam, sacralisant définitivement ce Sacred 3 au rang de bousin presque culte qu’il faudra esquiver à tout prix. Mais à l’occasion, s’il est compris dans un bundle généreux en jeux de Deep Silver, vous aurez toujours la possibilité d’enterrer le jeu dans un document Word, et ainsi, ne pas avoir le mauvais goût de mettre son raccourci à côté de celui de Sacred 2.

 

Même dans son esthétique, Sacred 3 ne s’avère même pas fidèle à son héritage. Ce n’est même pas un manque de soin vu que le jeu est plutôt bien fini, mais le résultat de multiples choix de game design incompréhensibles qui ne laissent aucun doute sur les mauvaises intentions de l’éditeur et du développeur. Une triste histoire du jeu vidéo que je tourne avec rage, constatant qu’on n’a pas voulu laisser mourir dignement la série avec un merveilleux second opus. Deep Silver, contentez-vous d’éditer les jeux de Piranha Bytes, et tenez-vous loin des autres séries cultes chéries par des niches de joueurs exigeants. Merci.

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A propos de l'auteur : Marcheur

Enfant attardé de Kreia et d’Alfred de Musset. Pense que tout est narration, et répète sans cesse qu’il donne tout en dansant comme un ouf

3 Commentaires sur “Error System : Sacred 3”

  1. All_zebest dit :

    Très bon article, comme toujours. Et dire que je n’ai toujours pas fait cette bouse ! Elle manque à ma collection.

    • Marcheur dit :

      Merci ;)
      Si tu as la malsaine curiosité de jouer à ce titre, les bundle le fourniront surement un jour comme il est dit dans l’écrit. Mais même offert, je ne sais pas si ça vaut le coup d’être joué ^^

  2. Ninheve dit :

    Je trouve très triste le massacre de cette licence avec Sacred 3, mais qu’est ce qu’il leur a pris? Ca en a le nom mais….c’est tout. Ils ont bâti ce jeu sur le renom de la licence mais rien n’était sacré pour eux, rien, si ce n’est l’argent qu’ils espéraient se faire sur le dos du travail de leurs prédécesseurs…. bande de païens incultes!

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