Fallout 4

Fallout 4

Cinq longues années séparent désormais Fallout : New Vegas de notre temps. Sept plus courtes années séparent aussi Fallout 3 de notre temps. Ces deux jeux ont en commun un même univers, un même héritage, mais deux buts très différents. Le premier est la digne descendance des plus vieux opus de la série, tandis que l’autre est un reboot destiné à un nouveau public, tout en essayant vainement de convaincre les fans de la première heure. A ces deux visions, deux développeurs, Obsidian et Bethesda. Chacun a ses défauts et ses qualités, bien que je préfère largement le studio Californien au studio Canadien ; je dois bien admettre que Fallout 3 est, et restera, un bon jeu. J’attendais donc le nouvel opus de Bethesda assez religieusement, pensant naïvement que la gifle d’Obsidian à l’égard du studio Canadien changerait à jamais le visage de ce quatrième épisode. Quand vint l’annonce pré-E3 2015 du titre, je n’étais plus qu’excitation et impatience, et quel bonheur de savoir que le jeu serait disponible en fin d’année. Qu’en est-il ?

 

 

Le courrier 6 n’a jamais délivré son message

Il m’est arrivé d’être déçu, il m’est arrivé d’être comblé, mais il ne m’est jamais vraiment rien arrivé sur Fallout 4 ; sans doute un alignement spécial des planètes a t-il brouillé mon jugement, au point que je ne sache plus qui je suis réellement. Un profond questionnement devant lequel mon top de jeux ne saurait trouver une réponse concrète. De nombreux débats internes ont suivi de nombreuses sessions de jeux, très espacées, très différentes, et aux ressentis contrastés. Jamais un jeu ne m’avait fait naviguer entre le ravissement le plus sincère et le dégoût le plus profond. Soyons plus clair : Fallout 4 n’est certainement pas aussi bon que Fallout 1, 2, New Vegas et même Fallout 3, parce qu’il ne crée pas de surprises, ne provoque pas de claques majeures, et s’avère l’épisode le plus plat et aseptisé de la série.

Je pourrais pragmatiquement dire que Fallout 4 est un mauvais jeu, briser la glace et dire qu’il ne s’agit que d’une vaine tentative de travestir le jeu de rôle afin de l’imposer à un autre public, mais il n’en est rien. Si Fallout 3 se séparait de beaucoup de codes de la série, il conservait un respect assez marqué de son héritage, permettant au jeu de proposer des fulgurances dans ses quêtes. Fulgurances qui lui valent aujourd’hui encore une affection sincère de ma part. Mais Fallout 4 va plus loin en jetant à la poubelle tout ce qui pouvait encore approfondir son système de jeu, au point de se rapprocher du très bon Skyrim. Au point de ne plus être un Fallout serais-je tenté de dire, et sans doute est-ce ce que j’aurais déclaré sans recul, il y a encore de cela quelques semaines.

Mais voyez-vous, le temps me ramollit, me rend sans doute plus réceptif à certaines choses, me donne une vision plus large, plus complète, et me permet de m’exprimer le plus sincèrement possible sur quelque chose, afin de vous faire part de mon verdict personnel complet de la chose. Et Aujourd’hui, je crois avoir compris pourquoi Fallout 4 n’est pas un jeu qu’il faut condamner pour ce qu’il est, parce qu’au fond, il n’a jamais été question du Fallout attendu par les millions de fans des premiers épisodes, mais bien du Fallout 2 fait par Bethesda ; cette suite très attendue par les fans du Fallout de 2008. Car il est peut-être temps d’accepter que Black Isle est mort, que Interplay aussi ; nous sommes en 2015, l’année de sortie de la suite du reboot d’une série qui n’aurait jamais connu de second souffle sans Bethesda. De plus, vous n’avez aucune raison de le regretter, car le dernier jeu Fallout édité par Black Isle, est cet immondice de Brotherhood Of Steel. Alors, qu’est-ce que j’en pense de ce Fallout 2 de Bethesda ?

 

On avait dit 2015 !

Alors pour commencer par le commencement, j’ai acheté une console de nouvelle génération en début d’année 2015, je me suis pris une gifle assez impressionnante sur le magnifique – mais très chiant – Assassin’s Creed : Unity, avant de me prendre un revers sur l’apollon qu’est Ryse : Son Of Rome. Maintenant que j’ai digéré ce changement de génération assez impressionnant, je peux déclarer ceci sur Fallout 4 : mouerf.

Quoi, mouerf ? Plutôt beau, plutôt laid ? Bah pour tout dire, c’est plutôt complexe, car cela prend en compte le fait que le jeu ressemble à s’y méprendre au 3 dans les intérieurs, et ressemble à un jeu moderne lorsque l’on constate la gestion des éclairages et de la météo en extérieur. Pour être plus précis, disons que les intérieurs de bâtiments, sauf à de très rares occasions, sont assez peu détaillés – et souvent détaillés avec des textures ignobles (… je pèse mes mots) –  avec des modélisations grossières. Mais à ces intérieurs hideux, on opposera des environnements extérieurs urbains – ou non – tout à fait baroques, remplis de choses à voir, de détails, de modélisations crédibles, ainsi que de textures un peu plus soignées. Enfin, en extérieur, hormis la distance d’affichage myope, tout est tout à fait propre et parfois subjuguant d’esthétisme (… attendez de voir une tempête radioactive ou un lever de soleil).

Pour ce qui est des environnements, je tenais à faire une mention spéciale à la ville de Boston : Merci. Merci de m’avoir offert une ville crédible, magnifique, gigantesque, labyrinthique, dense et remplie de plans tous plus magistraux les uns que les autres. Merci d’avoir fait ce que Fallout 3 n’a même pas réussi à effleurer. Niveau level design, on est aussi devant ce qui se fait de mieux ; c’est plus qu’impressionnant, c’est pharaonique. Je n’ai plus trop d’adjectifs mélioratifs, donc on va passer à quelque chose d’un peu plus négatif.

 

Bethesda. Je sais que vous avez un problème avec les êtres humains. Ce n’est pas de votre faute, sûrement, mais la prochaine fois que vous me proposez des personnages aussi laids et peu inspirés, je commandite l’assassinat de vos designers ! Vous n’avez pas honte de passer après The Witcher 3 avec des machins aussi immondes ? Aussi mal animés ? Aussi peu originaux ? Vous avez de la chance que le reste des êtres vivants soient beaucoup plus crédibles – et animés avec talent – ce qui rend votre incapacité à rendre des humains réalistes encore plus étonnante. Quand je vois le soin que vous mettez à animer les goules du jeu, ainsi que les animaux, je ne peux que hausser les sourcils en voyant un PNJ avancer vers moi avec un placard à balais dans le fondement.

Et la musique… Inon Zur, je vous croyez bien plus talentueux ! Je me fend d’une éloge de votre travail sur Dragon Age 2, et vous venez me refiler une bande son aussi plate et ennuyeuse sur votre plus gros contrat ? Faut-il que je vous le répète, ou vous ne voulez juste pas comprendre ? Si Bethesda vous demande, ce n’est pas pour faire du Jeremy Soule ! Voilà, vous ne travaillez pas sur The Elder Scrolls VI, mais bien sur Fallout 4. C’est tout de même le jeu qui est sensé avoir une bande sonore glauque, limite dérangeante, un peu comme ce morceau de Fallout 1 :

 

 

Et ce n’est pas le changement de direction de la série qui justifie le changement de direction musicale, très cher ami. Fallout 4 est un jeu à l’environnement hostile, radioactif. Les gens encore en vie sont souvent des pillards qui en ont après toi, le reste de la population a la chair brûlée ou mutée par les radiations, et le peu de faune qui reste rêve de te dévorer. Il vous faut un dessin ? Non, bien sûr que non, puisque vous avez prouvé avec Fallout : New Vegas que vous étiez talentueux. Alors ça :

 

https://loutrage.fr/wp-content/uploads/2016/01/Fallout-4-OST-10.-Of-the-People-for-the-People.mp3

Of the People for the People

 

Ça, cela ne prend pas dans ce contexte précis. Je suis attristé de dire cela, parce que votre travail est très correct, mais totalement hors propos. Et tant que nous sommes dans la musique, les envolées épiques, vous vous les foutez où je pense ! Une fois avec Fallout 3, je veux bien, mais une seconde avec le 4, tu te  fous de ma gueule, et j’emploie le tutoiement parce que là, c’est trop. Je joue un vagabond survivant de l’apocalypse, pas Batman :

 

 

Et le pire est que c’est une nouvelle fois une belle composition ! Mais je vous pardonne ; vous avez sûrement été mal encadré dans votre travail, et le projet devait être assez obscur sur ses intentions. Passons aux doublages, qui, s’ils sont rares (… je préciserai cela plus tard dans le texte) sont d’excellentes factures. Avec à l’appui des acteurs / doubleurs de grands talents. Sauf qu’il faut faire avec des dialogues mal connectés ; à certaines occasions, le temps d’une ligne, le personnage a une voix brisée par la tristesse, tandis qu’à la suivante, il reparle tout à fait normalement. Pour illustrer cela, on peut trouver ce genre de choses :

– Putain j’ai tout perdu, j’ai perdu tout ce qui comptait encore pour moi dans ce monde de merde…
– Il faut qu’on retourne à la base faire notre rapport.”

Niveau crédibilité on a vu mieux, et on constate ce genre de stupidités de manière assez fréquente. Les bruitages sont eux aussi très réussis, et bien moins inconstants. Il faut entendre une goule ou un écorcheur hurler en fonçant sur vous afin de vous rendre compte du travail réalisé. Mention spéciale aux flingues, qui tapent là où il faut pour réveiller le feeling qu’on apprécie dans un FPS ; tirer est un petit plaisir dans Fallout 4, et après les pistolets à billes de Fallout 3, cela fait un bien fou.

Donc, cette réalisation s’avère au final assez correcte, mais décevante pour un titre de Bethesda. Au regard de son rendu plutôt sommaire, on s’attend à ce qu’elle présente au moins une propreté technique bienvenue après Skyrim, vu qu’il s’agit du développement le plus long, le plus cher, et sur le même outil de développement du studio ? Alors pourquoi, bordel, mon jeu freeze régulièrement ? Pourquoi n’est-il pas fluide en toutes circonstances ? Et pourquoi y a t-il autant de bugs ?

 

Une finition honteuse, et cette fois y en a marre

C’est un nid à bugs ! Un nid à emmerdes et à instabilités techniques ! Qu’est-ce que vous avez foutu pendant les cinq mois précédents la sortie du jeu, où vous déclariez tout fier “On a fini le développement, et maintenant on corrige les bugs”. Ah oui, et pour quel résultat ? A l’heure actuelle, j’ai cinq missions qui attendent un correctif pour être complétées, j’ai subi cinq plantages de la console (!), j’ai constaté des micro-freezes de manière fréquente, à tel point que j’en ai pris l’habitude. Je ne peux plus rentrer dans un lieu clé de faction, car à l’instant où j’entre dans le bâtiment, le sol se dérobe sous mon personnage.

Ah, et ce n’est pas fini ! Des personnages disparaissent sous le sol, des dialogues ne se déclenchent pas, des ennemis se bloquent dans le décor, des chargements inhabituellement longs, mon arme n’apparaît pas dans les mains du personnage, des objets disparaissent de mon inventaire, des compagnons disparaissent de la surface du monde de jeu. Je peux continuer longtemps pour en arriver à un constat simple : votre jeu est fini à la pisse, et le pire est que vous vous saluez d’avoir sorti votre jeu le plus propre à ce jour. Je salue donc à mon tour le fait que vous vous foutez bien de votre public, et que comme d’habitude, vous allez attendre qu’il corrige votre jeu avec l’outil que vous allez leur offrir, prétextant que c’est pour qu’il laisse son imagination s’exprimer. Vous êtes détestable, vraiment.

Pourtant, vous ramassez la mise à chaque fois, parce que vous avez du talent pour proposer des mondes intéressants et plaisants à explorer, dans lesquels on aime bien revenir. Sauf que cette fois encore, votre plume a montré ses limites. Et là-dessus, je risque d’être beaucoup plus acerbe qu’avec un Skyrim, pour la simple et bonne raison que vous avez été encore plus mauvais que d’habitude.

 

 

Va tuer tout ce qui bouge dans cette usine et tu auras cent capsules

Voilà, avec un titre assassin, j’ai résumé 90% des quêtes du jeu. Vous trouviez que Fallout : New Vegas comportait des quêtes fedex ? C’est parce que vous n’avez pas encore joué à Fallout 4 et ses objectifs procéduraux. Dans Skyrim, il arrivait assez fréquemment qu’en demandant à un tavernier, il nous donne pour mission d’accomplir une prime assez basique, tel le meurtre d’un géant. Dans Fallout 4, la contextualisation est désormais différente, mais le résultat est le même, de manière extrêmement fréquente ; le peu de personnages présents vous demande d’aller tuer trente pillards dans un donjon, de récupérer une bobine dans une usine infestée d’écorcheurs… Bref des objectifs rébarbatifs et navrants. Navrants dans la mesure où Fallout 3 les esquivait de fort belle manière, en proposant peu de quêtes, mais des quêtes longues et travaillées, aux objectifs parfois simples, mais se déroulant dans des lieux marquants. Ici, il n’est question de ce genre de quêtes qu’à de très rares occasions. Je n’aurai pas besoin de ma seconde main pour vous dénombrer les arcs narratifs intéressants que possède le jeu. Plus grave, la quête principale n’en fait pas partie, mais j’y reviendrai.

Parlons de l’open world. Se balader dans Boston est plaisant. Le wasteland est plaisant lui aussi, mais bien moins, parce qu’il est très vide. Déjà, et surtout, parce qu’il n’a pas la même atmosphère hostile que les terres désolés de Fallout 3. J’ai lu beaucoup de critiques sur le gris-verdâtre du troisième opus de la série, mais il participait à raconter à sa manière le background du jeu ; les terres étaient simplement brûlées, rien n’en jaillira plus jamais car les radiations avaient tout détruit. Cela donnait aux terres de Fallout 3 une hostilité flagrante, et une beauté crue du plus bel effet. Dans Fallout 4, les herbes recommencent à pousser, la couleur revient petit à petit ; ce qu’on y gagne en esthétisme et en réalisme (… la nature n’attendra pas pour reprendre ses droits), on y perd en ambiance. Disons que Fallout 4 invite à espérer un monde meilleur, un monde où les humains peuvent reconstruire, un monde où le héros est invité à construire sa communauté, à créer quelque chose de la poussière de l’ancien monde. Or, cela crée plusieurs incohérences qui me gênent.

Le contexte est plus chaleureux qu’habituellement. Pourtant, l’idée m’enthousiasmait assez. Mais alors pourquoi y a t-il si peu de personnages amicaux, et ce trop plein d’ennemis – humains ou non d’ailleurs – à dégommer ? Pourquoi y a t-il si peu de dialogues – si mal écrits aussi – et pourquoi, une fois encore, sommes nous au cœur d’une guerre de faction qui représente à elle seule, plus de 80% de la population amicale à votre égard ? Je sais bien que Fallout porte sur ses épaules un message fort “War never changes”, ou “La guerre ne change jamais”, mais ce message ne s’applique pas vraiment dans ce contexte. Fallout 4 n’est pas un conflit d’intérêt ; le contrôle de Boston n’a pas d’enjeux particuliers, ou du moins sont-ils mal identifiés. Alors pourquoi trois factions iraient s’étriper pour le contrôle d’une zone qui ne présente pas vraiment d’intérêt ? C’était toute l’intelligence de Fallout : New Vegas : partir d’un contexte simple pour mettre en scène des partis complexes, immondes dans un sens, et bénéfiques dans l’autre.

Ici l’implication du joueur disparaît dès lors que nous passons l’introduction de l’histoire, car une fois encore, le joueur est directement pris à parti par un enjeu important et dont on se contrefout. On s’en fout parce que le personnage que l’on recherche, ne nous a été présenté qu’environ 30 secondes au total. Et je repose la même question que pour “papa” dans Fallout 3 : suis-je sensé en avoir quelque chose à faire d’un personnage que je ne connais pas ? Ce syndrome se retrouve dans le monde entier, car les factions sont peu ainsi que mal introduites, et souffrent d’un vrai manque de travail en matière d’écriture. Aucune ne s’avère pleinement bien présentée au joueur. Ainsi, faire le choix entre ces factions reste un mystère pour ma part, parce que quel que soit l’interlocuteur, je m’en fous. Je ne vous connais pas, je ne vous apprécie pas, alors pourquoi irais-je vous aider ? Le jeu tombe alors dans le déprimant “fais ceci pour acquérir cela” et si vous n’en avez plus envie, vous n’avez plus qu’à arrêter le jeu, car il est tout simplement incapable de proposer un enjeu intéressant.

Reste que certains lieux, quelques moments dans la quête principale – et plus globalement des détails dans l’écriture – le sous-texte et une poignée de personnages redressent légèrement la barre. Une somme de détails pratiquement insignifiants permettent de garder un peu plus éveillé le joueur exigeant que je suis devenu. Parce que oui, Fallout : New Vegas m’a rendu plus exigeant en matière de contenu. Un grave manque de fond et d’âme afflige Fallout 4 d’un sentiment assez handicapant : le sentiment d’arpenter un monde ouvert réussi, au world design impressionnant, mais passé le visuel et le plaisir instantané, le fond est absent. Et c’est ce fond qui différencie le bon jeu du grand jeu. On ne peut pas baser un jeu à monde ouvert avec un message à faire passer sur une base aussi fragile. Comment dans ce cas amener le joueur à s’intéresser au reste, c’est à dire au jeu lui même ? Parce que oui, je vais en parler du jeu, et c’est bien là où le gâchis devient complet, car Fallout 4 est le meilleur jeu de Bethesda.

 

 

Persévérance est le mot, Bethesda a réussi

Fallout 3 était un RPG médiocre, ainsi qu’un FPS médiocre. Voilà comment on peut résumer la jouabilité de ce titre ; pas que le mélange était déplaisant, mais le cul entre deux chaises ne lui a jamais permis d’être jouissif, d’un côté comme d’un autre. Pour Fallout 4 en revanche c’est tout à fait différent. Parce que pour le coup, Bethesda, complètement impuissant dans la création de jeu de tir à la première personne, a fait appel à la crème de la crème. Si je vous dis ID Software, en toute logique si vous aimez les jeux vidéos et le métal, vous me répondrez Doom. Eh bien sachez que les gunfights de Fallout 4 sont l’œuvre en partie d’ID Software, car, si c’est pour se faire aider, autant prendre l’aide du roi du genre. Ainsi les pétoires de Fallout 4 ont du répondant, le feeling s’avère bien souvent très correct, et l’ensemble dégage un soin infiniment supérieur au précédent épisode. Pas non plus de raisons de sauter au plafond ou de crier au génie. Ça, non. Mais cela fait du bien d’avoir une jouabilité qui tient la route.

Cela dit, si les affrontements sont plaisants, je tiens à signaler que l’IA arrive au stade de la mort cérébrale. Qu’on vienne l’aider, je vous en prie ! Et encore, si les ennemis sont juste débiles, vos alliés en deviennent dangereux. Il serait peut-être temps pour les développeurs de jeux d’investir dans la recherche pour des intelligences artificielles plus performantes ; cela doit faire deux générations où il n’y a pas eu un bond dans la qualité globale des adversaires, sauf en de trop rares cas.

Il en va de même des déplacements, plus souples (… toujours rigides malgré tout) qu’auparavant, avec un sprint bienvenu, et une meilleure gestion de l’inertie du personnage. On note l’apparition surprenante, ou du moins la transformation, de l’armure assistée si chère à la série. De simple protection (… une protection de fou, ouais !) elle est devenue une véritable exo-armure à customiser à loisir. Ah, et tant qu’on parle de customisation, autant le dire direct, niveau personnalisation du personnage et impact sur l’environnement, Fallout 4 a fait fort, d’autant plus que Bethesda n’était pas habitué au housing, à part avec le DLC Hearthfire de Skyrim. On peut tout simplement modifier l’intégralité de nos armes, de nos armures, créer des consommables de différentes sortes… Bref, tout ce qui est équipement est retouchable.

Mais là où cela devient surprenant – limite ridicule – c’est la personnalisation de « zone ». À de nombreux lieux prédéfinis (… qu’il faudra pacifier au préalable), vous pouvez créer votre village, votre maison, la meubler, voir même créer une ville avec son réseau électrique, gérer la vie et les besoins de citoyens assignés à vos différentes communautés… Le potentiel est gigantesque, et les amateurs de housing et de gestion simplifiée passeront des heures sur ce mode de jeu presque totalement optionnel. Et pour créer tout cela, que ce soit des consommables, des équipements, des meubles, des maisons, il vous faudra trouver des matières premières. Ce qui fera de vous un véritable récupérateur, et rend tout objet susceptible d’être un trésor brut qu’il faudra raffiner. Une fourchette peut-être une trouvaille intéressante dans Fallout 4, et ce n’est pas Nestor de Planescape Torment qui dira le contraire !

Pour couronner le tout, vous ramasserez un équipement en masse et très varié. Tout cela dans un open world magnifiquement travaillé, rempli de lieux à découvrir, de nombreux secrets, et d’une ville simplement assommante de choses à voir. Vous aurez l’occasion d’apprécier l’exploration et les affrontements de ce monde ouvert à de très, très nombreuses reprises pour le meilleur… mais étrangement surtout pour le pire.

 

 

Pourquoi ? Parce que son système de choix se résume à 99 % en un choix entre « oui / non / oui rigolo / questions« . Ce sont des choix ça ? Et pourquoi seulement quatre options de dialogue possible ? Pourquoi y a-t-il si peu de compétences sociales ? Pourquoi les compétences ont disparu au profit des perks uniquement ? Pourquoi est-ce que je joue à un Skyrim appauvri avec des flingues ? Pourquoi il n’y a que les trois dernières heures de la quête principale et une poignée de quêtes qui proposent des choix et des conséquences ? Je n’ai même pas la force de vous insulter Bethesda. Même pas l’envie d’ailleurs, parce que votre jeu est bon. Mais il n’a pas d’âme, les bugs sont désolants et ne sont plus amusants, l’ambiance est froide, la direction artistique est réussie mais manque de piquant, l’humour lui fait presque complètement défaut, et ses dialogues sont stupides. Qu’est-ce qu’il lui reste hormis son open world pour faire de lui un titre supérieur à la moyenne ? Comment veut-il que je l’apprécie pleinement s’il n’arrive même plus à reconduire le peu de sel qui rendait Fallout 3 sincèrement plaisant ? Il n’est plus un jeu de rôle, d’accord, il me le montre maintenant. C’est votre vrai visage Bethesda : vous êtes lassé d’essayer de le cacher, mais pourquoi un tel manque de caractère ? Pourquoi un jeu aussi aseptisé ?

Pourtant, votre pari est gagné, votre jeu est plaisant à jouer, mais pas comme Skyrim ; j’ai 125 heures au compteur sur ma partie de Skyrim sans DLC et sans mods. Sur Fallout 4, je sature à 60. Parce que cela me surprend aussi, mais dans sa manière d’être une réussite dans tes mécaniques, cette façon qu’il a d’inviter à continuer de jouer pour roder encore plus mon personnage et maîtriser d’autant plus des combats réussis, il a perdu quelque chose. Un quelque chose fondamental pour ma part. Il n’immerge plus le joueur dans un univers et s’enlève même toute notion de rythme narratif, ne proposant qu’un gameplay épuré de tout artifice narratif. Le monde de Fallout 4 est joliment bâti, mais il ne vit pas. Il n’y a rien d’autre que des beaux paysages, et d’autres plus laids. Il y a du vide derrière les assets posés par Bethesda. Il n’y a pas d’âme comme l’ambiance de Bordeciel pouvait en insuffler. Il n’y a pas l’envie de respecter un minimum la licence tout en affirmant une nouvelle direction comme dans Fallout 3. En bref : il a gagné en maîtrise ce qu’il a perdu en âme.

 

 

Il sera, et est déjà, un carton ce Fallout 4. Mais il est vidé de sa substance, si appauvri même par rapport au troisième épisode qu’il en devient étranger à la série, et même à celle-ci quand elle eut été appauvrie. Mon souvenir des nombreuses heures passées en sa compagnie est déjà flou, alors que le souvenir d’un jeu moins bon, mais beaucoup plus caractériel comme un Lords Of The Fallen ou un Bound By Flame est plus vif, plus viscéral. Un homme trop savant fini souvent par se déshumaniser ; sans doute un jeu trop maîtrisé et trop dispersé pour plaire à tout le monde en devient-il ennuyeux,. Et en cela, il me rappelle le terrible destin de Dragon Age : Inquisition. À plus Fallout 4 ! Peut-être nos chemins se recroiseront-ils au hasard d’un mod réussi, mais cela ne sera dès lors plus au jeu de Bethesda auquel je jouerai, ce qui fait de lui un outil à potentiel, et non une œuvre.

 

Les AAA se ressembleraient-ils tous sur cette génération ? Sommes-nous en face d’une uniformisation au niveau des qualités et des défauts ? J’ai peur que la réponse ne nous apparaisse une nouvelle fois avec ce Fallout 4 que j’ai appréhendé comme il est. Une suite d’un jeu de Bethesda, studio qui n’a pas saisi sa chance en différenciant suffisamment Fallout de The Elder Scrolls. Le résultat est certes un très bon jeu, rempli de choses à faire, à voir, sûrement amusant, mais creux et ennuyeux une fois les concepts digérés. Je ne suis plus le public que vise Bethesda. Il m’a fallu 60 heures pour m’en rendre compte. Je ne déconseille pas le jeu cela dit ; si vous n’êtes pas connaisseur des jeux Bethesda, sans doute ce nouvel opus vous paraîtra-t-il brillant, mais à tous ceux qui ont déjà trop connus les titres de ce studio, je vous le dis sans détour : passez votre chemin. Je terminerai sur une musique, empruntée à Fallout : New Vegas, qui clôture pour ma part ma relation avec la série. Des beaux souvenirs, dont les meilleurs sont sans doutes ceux du dernier vrai Fallout, écrit par Avelonne et développé par Obsidian. Un grand jeu que je conseille encore aujourd’hui à tous. Au revoir Fallout, c’était un grand moment de jeu vidéo que tu m’as fait vivre.

 

Fallout New Vegas : War Never Changes End Credits

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« Et le courrier reprit sa marche, là où elle ne s’était jamais vraiment arrêtée, Boston derrière lui, il ne vit en elle que le pâle reflet des meilleurs moments de sa vie. Comprenant que ce chapitre était désormais révolu, il lâcha les affaires qu’il avait trouvé sur la route. Léger, il partit en se retournant quelques fois, mais finit par n’emporter que les souvenirs de l’Abri 13, du village d’Arroyo et de la Nouvelle Vegas. Désormais, il chercherait son avenir dans d’autres contrées sans doute plus fertiles, même si son chemin l’amènerait fatalement vers la guerre…

… et la guerre, la guerre ne change jamais.  »

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A propos de l'auteur : Marcheur

Enfant attardé de Kreia et d’Alfred de Musset. Pense que tout est narration, et répète sans cesse qu’il donne tout en dansant comme un ouf

5 Commentaires sur “Fallout 4”

  1. Toupilitou dit :

    Messages récupérés de l’ancien système de commentaires

    Ninheve : C’est le premier jeu Bethesda (TES ou Fallout) que j’ai entièrement laissé tombé au bout de quelques jours, je m’y suis ennuyée à mort…aucune motivation de poursuivre l’histoire (ah il y a une histoire?)…bref, quelle déception pour moi. Je suis 100% d’accord avec la critique du jeu, c’est l’apocalypse du post apo…

    Shylar : J’ai stoppé le massacre après 25H à titre personnel!

    Je te rejoins sur quasiment tous les points concernant ce Fallout 4 sauf ceci: « Parce que oui, je vais en parler du jeu, et c’est bien là où le gâchis devient complet, car Fallout 4 est le meilleur jeu de Bethesda. » Pourquoi? Il est plus mauvais sur la majorités des aspects que Fallout 3 sauf sur le côté « Action », à savoir pas là où on l’attendait. C’est le jeu en monde ouvert le plus « linéaire » dans son exécution et dans tout ce qu’il propose!

    Je ne dirai pas que Morrowind est le meilleur jeu de Bethesda, car il traîne une pelleté de défauts et que tous leurs jeux (jusqu’à Fallout 3) ont de grosses qualités. Mais c’était un jeu gratifiant, dense, vivant et varié! Il y avait des guerres politiques, de factions, entre les différentes guildes, des personnages moins manichéens que ce qu’il paraissait en surface, personne n’était vraiment « gentil » ou « méchant » parmi les principaux protagonistes. Alors effectivement, il était très statique et il n’y avait aucun choix ayant des conséquences, mais je le considère comme le Witcher 3 de son époque en terme d’écriture.

  2. Toupilitou dit :

    Le temps que vous avez tous passé sur ce jeu m’impressionne ; j’ai tenu 6 heures avant de totalement décrocher. Au delà des dialogues plan-plan, je crois que c’est l’aspect « construis ta cabane-post-apo » qui m’a achevé. Du coup, je l’ai rangé gentiment dans la même catégorie que Dark Souls : Prepare To Die Edition, à savoir celle des jeux qui prendront éternellement la poussière ^^

  3. Marcheur dit :

    Alors justement tu l’as dit, le plan action qui compose la majeure partie d’un jeu de Bethesda, s’avère extrèmement efficace dans un titre comme Fallout 4. Même si sur le plan « plaisir » d’un domaine comme le roleplay, Fallout 4 est indigent, le plaisir que j’ai eu à shooter tout ce qui passait devant moi dans le dernier Bethesda fait que mécaniquement, je trouve que c’est leur jeu le plus plaisant.

    Mais le reste est bel est bien naze, je te l’accorde qu’avec du recul, j’aurais peut-être mieux fait d’écrire la chose différemment

  4. Shizam dit :

    Perso je ne suis pas déçu par ce Fallout4. Car avec Bethesda on devait s’attendre à cela.
    On ne va pas revenir sur l’écriture et la mécanique attendue des Fallout 1 & 2, qui ne reviendront jamais, et certainement pas chez Bethesda.
    Mais je pense que la plus grosse tare du jeu, c’est la fainéantise dans le registre des factions. Ce que nous appelons ici le rôleplay.
    Il est évidemment affligeant dans F4, voir tellement bridé et bas de niveau qu’on peut se demander pourquoi Bethesda n’a pas tout simplement fait un jeu d’Aventure sur une seule trame.
    Car avec juste un jeu des factions plus « libre », et surtout mieux pensé et mieux écrit, cela aurait sans doute été suffisant pour en faire un bon jeu dans sa globalité, qui se veut apriori étre un bac à sable. Et de ce coté là, même si techniquement c’est à la ramasse, le coté bac à sable est encore assez intéressant dans la formule de Bethesda.

    Je dis fainéant, car Obsidian avait assez joliment relevé le tout pour Fallout3 avec New Vegas ( déja trés « rustique » globalement ). Et que Bethesda aurait du à minima en faire autant sur F4.
    Libérer le système de factions, c’est libérer le jeu .
    Dommage…

  5. Marcheur dit :

    Le problème c’est justement ce que tu dis, Bethesda avait les cartes en main et semblait pouvoir se donner les moyens de faire un système de jeu plus rôleplay, mais le tout est complètement sabordé par un rush total et un manque d’intérêt global de l’histoire.
    Heureusement, le système Bethesda marche encore et est bien huilé, et compilé à des gunfight enfin solides, bah le plaisir reste présent, j’aurais moi aussi préféré voir un pur jeu d’aventure assumé, là on a un… jeu avec le cul entre deux chaises qui se traînent son médiocre côté RPG alors que c’est sensé être son sel.


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